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Actualité du droit international de l'environnement :

Événements récents et actualité des conventions internationales.

 

par Thierry Vaissière (décembre 2003)

 

Cette chronique est plus longue que les précédentes. Elle porte essentiellement sur les problèmes relatifs à la protection de l’atmosphère au niveau mondial. Il est aujourd’hui possible de se demander, au vu du comportement de certains Etats, si les instruments juridiques existant dans ce domaine ne sont pas au fur et à mesure purement et simplement vidés de leur substance. Comme nous le montrerons, la perspective d’une entrée en vigueur prochaine du Protocole de Kyoto s’éloigne de plus en plus. Surtout, l’attitude des Etats-Unis lors de la 15e réunion des Etats parties au Protocole de Montréal risque de remettre en cause  son efficacité.

 

I. – Evénements récents

 

Un article paru dans Le Monde signale que la Russie a annoncé par le biais de son président qu’elle n’avait pas pour le moment l’intention de ratifier le Protocole de Kyoto. Ce refus est problématique pour l’entrée en vigueur de ce texte dans la mesure où les dispositions de ce dernier posent une double condition à son entrée en vigueur. Premièrement, le Protocole doit avoir été ratifié par un nombre suffisamment important d’Etats. Cette condition est aujourd’hui remplie. Deuxièmement, les Etats ayant ratifié le Protocole doivent représenter au moins 55 % de la production mondiale de dioxyde de carbone. À l’heure actuelle, les Etats ayant ratifié le Protocole ne représentent que 44 % de la production mondiale. Or, il est notoire que la production russe est de l’ordre de 17 %. La ratification russe entraînerait donc automatiquement l’entrée en vigueur du Protocole (il faut cependant noter que l’entrée en vigueur est aussi - et surtout - paralysée par le refus américain - notamment de l’administration Bush). Quelles sont les raisons qui expliquent ce refus russe ? Au-delà des explications amusantes de M. Poutine – concernant le fait que les Russes verraient probablement d’un œil favorable une augmentation de quelques degrés de leur climat, leur permettant d’avoir des hivers moins rigoureux – il faut surtout y voir un moyen pour la Russie de faire pression sur les Etats ayant ratifié le Protocole et notamment sur l’UE. Les Russes essaient d’obtenir des garanties d’ordre financier qui leur permettraient de moderniser leur secteur énergétique qui est aujourd’hui si vétuste, qu’il les placerait dans l’impossibilité de respecter les dispositions du Protocole. Voir l’article du Monde du 1er octobre 2003. La conférence des Etats parties s’est tenue à Milan mi-décembre. Elle fera l’objet d’une chronique prochainement. Elle s’est achevée dans le pessimisme. Voir l’article du Monde du 13 décembre 2003.

 

Plusieurs articles ont été publiés dans Le Monde concernant le naufrage du Prestige et ses conséquences. Il y a maintenant un peu plus d’un an, le 19 novembre 2002, le pétrolier le Prestige sombrait au large des côtes espagnoles. Il contenait environ 77 000 tonnes de pétrole. Le pétrolier continue aujourd’hui de polluer. Son naufrage suscite de nombreuses questions.

 

  • Questions sur la responsabilité. Tous les responsables potentiels ont disparu, sauf le capitaine du navire. Le navire semble n’avoir jamais appartenu à quiconque, n’avoir jamais été inspecté, ni assuré et encore moins financé. Le naufrage du Prestige est malheureusement révélateur des pratiques maritimes. Le navire fut construit en 1976 au Japon sur les instructions d’un Grec. Son équipage était composé de Philippins et de Roumains. Il était affrété par une société russe ayant son siège social en Suisse. Le navire a battu pavillon panaméen pendant 26 ans. Au moment du naufrage, il battait pavillon des Bahamas. Il appartenait alors à une société domiciliée au Liberia en réalité détenue par des Grecs. Le Prestige avait récemment fait l’objet de réparations insuffisantes à l’origine du probable du naufrage en Chine. Il avait été inspecté aux Emirats Arabes Unis par le représentant d’une société domiciliée au Texas…

  • Questions également sur l’importance du dommage écologique qui ne fait jamais l’objet d’une indemnisation. Pour le moment, les experts estiment que l’impact du naufrage se fera encore ressentir pendant de nombreuses années sur la faune. Le naufrage a entraîné des conséquences très importantes sur la pêche (- 23 % en 2003). De nombreux oiseaux de mer ont été touchés de manière très importante par la pollution. Une espèce a ainsi aujourd’hui presque entièrement disparu des côtes espagnoles. Les travaux de nettoyage ont occasionné d’importants dommages à l’habitat côtier et/ou terrestre de nombreuses espèces. La concentration maximale d’hydrocarbures reste encore à un niveau élevé dans les fonds marins.

  • Questions sur l’indemnisation des victimes. Le 20 octobre 2003, le Fonds international d'indemnisation pour les dommages dus à la pollution par les hydrocarbures (FIPOL) a annoncé plusieurs décisions par le biais de son comité exécutif. Il se proposait de limiter le taux de remboursement des victimes seulement à hauteur de 15 % des dommages qu’elles ont réellement subis. Aujourd’hui, le coût de la marée noire est estimé dans une fourchette allant de 650 à 785 millions d’euros en Espagne et 100 à 200 millions en France. Le FIPOL dispose simplement d’une enveloppe limitée à 170 millions d’euros. En mai, l’Organisation maritime internationale (OMI) avait décidé de relever le plafond d’indemnisation à un milliard d’euros dans un nouveau protocole. Ce dernier n’est cependant pas encore appliqué en raison du peu de ratification de la part des Etats. Or, la ratification du protocole par les Etats membres de l’Union européenne suffirait à le rendre applicable. Ce problème d’entrée en vigueur est d’autant plus paradoxal que les Etats membres de l’Union ont entrepris de nombreux efforts pour interdire leurs eaux territoriales aux navires-poubelles.

Voir les articles publiés dans Le Monde les 21 octobre et 20 novembre 2003.

 

II. – Actualité des conventions du droit international de l’environnement

 

La 15e réunion des Etats parties au Protocole de Montréal s’est tenue à Nairobi au Kenya des 10 au 14 novembre 2003.

Une grande partie de notre chronique sera consacrée à l’examen de cette 15e réunion des Etats parties, en raison de l’existence de menaces américaines consistant à ne plus respecter certaines de leurs obligations. Nous rappellerons dans un premier temps le cadre juridique des instruments en matière de protection de la couche d’ozone. Dans un deuxième temps, nous donnerons des explications sur les raisons ayant conduit à la cristallisation des négociations pendant la 15e réunion des Etats parties. Enfin, dans un troisième temps, nous examinerons les conséquences juridiques de cette décision.

A. – Cadre du régime conventionnel mis en place pour protéger la couche d’ozone

Dès le début des années 70, les scientifiques se sont alarmés de la dégradation continue de la couche d’ozone. Ils ne savent pas encore aujourd’hui nous renseigner sur la totalité des intérêts présentés par la couche d’ozone à l’échelle de la planète. En revanche, un élément est certain : la couche d’ozone permet la filtration des rayons ultraviolets émis par le soleil, qui sont nocifs à la vie telle qu’elle a pu se développer sur terre. Forts de ses observations, les scientifiques ont alerté la communauté internationale, et notamment le PNUE. Le processus d’élaboration d’un instrument juridique visant à limiter l’emploi de substances appauvrissant la couche d’ozone est alors lancé. Il débouchera sur la conclusion de la Convention de Vienne signée en 1985. Ce premier texte se borne à déterminer le principe juridique de l’élimination progressive des substances concernées, sans que les Etats aient des obligations juridiques contraignantes quant aux matières dont l’emploi doit disparaître.

Ce sera chose faite avec le Protocole de Montréal, adopté seulement deux années après la conclusion de la Convention (1987). Le Protocole désigne des substances reconnues comme appauvrissant la couche d’ozone. Il comporte des mesures concernant le gel et la réduction progressive et totale de la production et de la consommation des substances qui appauvrissent la couche d’ozone. Les Etats développés ont des obligations d’élimination qui suivent un calendrier plus court dans le temps que les Etats en développement (désignés à l’article 5 du Protocole). Le Protocole a été modifié par une succession d’amendements, qui ont sans cesse rallongé la liste des produits concernés et donc des obligations juridiques des Etats parties (amendements de Londres datant de 1990, amendements de Copenhague datant de 1992, amendements de Montréal datant de 1997 et amendements de Pékin datant de 1999). 

B. – Cadre des négociations de la 15e réunion des Etats parties

Le Protocole de Montréal est reconnu comme étant l’un des traités de droit international de l’environnement le plus efficace, pour de multiples raisons. L’une d’entre elles tient notamment au fait que des substances de remplacement avaient été mises au point dès l’élaboration des instruments juridiques, permettant ainsi l’élimination sans réelles difficultés des substances remplacées. Or, cela n’est plus complètement vrai aujourd’hui pour certaines d’entre elles. Cet élément nouveau risque de faire éclater le fonctionnement du Protocole.

Des négociations laborieuses se sont déroulées pendant la 15e réunion des Etats parties au sujet d’une de ces substances qui n’a pas été entièrement remplacée par de nouvelles substances et dont l’usage reste donc encore nécessaire dans certains domaines limités. Il s’agit du bromure de méthyle qui est un pesticide aujourd’hui utilisé pour la culture de fruits. Il est employé afin de nettoyer le sol avant d’installer de jeunes plants. Voir Le Monde du 15 novembre 2003. En octobre 2003, la Communauté européenne a fait circuler de manière officielle des informations au sujet de l’adoption d’un calendrier approprié de réduction du bromure de méthyle pour les Etats en développement. Selon ce document, il apparaît que  de nombreuses substances de remplacement existent déjà sauf concernant deux applications : « aucun produit de rechange adapté n’a été mis au point pour le ginseng en Chine et les dattes fraîches en Afrique du Nord ».

Les mesures concernant le bromure de méthyle sont différentes suivant les Etats concernés. Un résumé des mesures de réglementation peut être utilement consulté sur le site Internet mis en place par le secrétariat des instruments juridiques concernant l’ozone. Ainsi, il est notamment prévu à l’article 2H, tel qu’il a été modifié que :

  • Pour les Etats développés, le niveau de production et de consommation de référence utilisé est 1991. Le gel de la production et de la consommation a commencé à compter du 1er janvier 1995. Une première réduction de 25 % a eu lieu le 1er janvier 1999, une deuxième de 50 % le 1er janvier 2001, une troisième de 70 % le 1er janvier 2003. Enfin, à compter du 1er janvier 2005, il ne sera plus possible d’utiliser le bromure de méthyle. Cependant, des dérogations sont possibles aux fins d’utilisations d’importance critique, c’est-à-dire dans les cas où un Etat serait dans la situation où l’utilisation serait primordiale pour son économie.

  • Pour les Etats en développement, la situation est bien différente. Le niveau de référence des Etats sera calculé à partir d’une moyenne se basant sur la moyenne des quantités produites et consommées de 1995 à 1998. Le gel de la production et de la consommation est organisé à compter du 1er janvier 2002. Une première réduction de 20 % est mise en place à compter du 1er janvier 2005 – date à laquelle, comme nous venons de le montrer la réduction est de 100 % pour les Etats développés. Enfin, l’interdiction de la production et de la consommation commencera à compter du 1er janvier 2015, soit 10 ans après celle des Etats développés. Notons également que des dérogations sont possibles dans les mêmes conditions que pour les Etats développés.

  • Les mesures concernant les Etats en développement sont transitoires, puisqu’il avait été décidé dans la décision IX/5 de la 9e réunion des Etats parties que « la Réunion des Parties décidera en 2003 de nouvelles réductions provisoires spécifiques applicables au bromure de méthyle au-delà de 2005 dans les Parties visées au paragraphe 1 de l’article 5 », c’est-à-dire pour les Etats de développement. C’est pour cette raison que la Communauté européenne est à l’origine du document d’informations auquel nous faisions allusion plus tôt. Les discussions concernant le bromure de méthyle étaient donc programmées.

  • De plus, la 15e réunion des Etats parties devait se prononcer sur deux autres questions délicates : désignation pour les dérogations aux fins d’utilisations d’importance critique et conditions dans lesquelles ces dérogations peuvent être accordées.

C’est dans ce cadre juridique qu’a surgi une polémique dont les Etats-Unis sont à l’origine. Des rumeurs ont circulé pendant la 15e réunion des Etats parties concernant leur retrait éventuel du Protocole. Elles ont été alimentées par la proposition de loi de 21 membres américains du Congrès consistant à autoriser l’administration de protection de l’environnement (Environmental Protection Agency ou EPA) à accorder aux industriels américains les dérogations dont ils souhaiteraient bénéficier, sans tenir compte des obligations déterminées dans le Protocole. Pendant la 15e réunion des Etats parties, les délégués américains ont estimé qu’un procès d’intention injustifié leur était fait.

Pour le moment, aucune décision sur le fond n’a été prise au sujet des questions soumises à la 15e réunion des Etats parties. Une réunion exceptionnelle concernera ces questions. Elle se déroulera des 24 au 26 mars prochains à Montréal, au Canada. Voir le projet de rapport des Etats parties à la 15e réunion des Etats parties.

C. – Conséquences juridiques du comportement des Etats-Unis

Plusieurs questions peuvent être posées en ce qui concerne le comportement des Etats-Unis au sujet du bromure de méthylène.

  • Comme nous le précisions à l’instant, certains députés américains ont déposé un projet de loi contraire aux obligations des Etats-Unis en application du Protocole. Est-il possible de considérer qu’il s’agit d’une violation du Protocole ? Selon l’article 26 de la Convention de Vienne sur le droit des traités, « tout traité en vigueur lie les parties et doit être exécuté de bonne foi ». Cet article détermine donc le principe suivant lequel les Etats doivent respecter fidèlement leurs engagements. Il implique notamment que les Etats introduisent dans leur droit interne les dispositions correspondantes du traité, et donc ici que les Etats-Unis se conforment à l’article 2H du Protocole. Quelles sont les règles appliquées lorsqu’une disposition d’un Traité est en conflit avec une norme nationale ? Plusieurs solutions méritent ici d’être rappelées. Elles sont différentes suivant qu’elles sont fournies par l’ordre international ou l’ordre interne. Seules nous intéressent ici les premières. Tout d’abord, l’article 27 de la Convention de Vienne précise que « Une partie ne peut invoquer les dispositions de son droit interne comme justifiant la non-exécution d’un traité ». Cet article est interprété comme conférant une supériorité aux règles internationales sur les règles internes. Ensuite, non seulement, le juge international utilise cette interprétation concernant des conflits entre une règle conventionnelle et la constitution d’un Etat, mais en plus, cette même interprétation est donnée pour régler les contradictions entre une disposition d’un traité et une loi. Il ne fait donc aucun doute que si les Etats-Unis décidaient de voter un projet de loi contraire aux dispositions du Protocole, cela serait susceptible d’engager leur responsabilité internationale pour violation de l’article 2H du Protocole.

  • Est-il possible de considérer que le vote de la loi par le Parlement américain pourrait constituer une dénonciation du Protocole ? Pour répondre à cette question, plusieurs points méritent d’être examinés.

    • Tout d’abord, le Protocole lui-même autorise les Etats à dénoncer leurs engagements dans certaines conditions. Cette possibilité leur est offerte dans l’article 19 : « Toute partie peut dénoncer le présent Protocole, par notification écrite donnée au dépositaire, à l'expiration d'un délai de quatre ans après avoir accepté les obligations spécifiées au paragraphe 1 de l'article 2A. Toute dénonciation prend effet à l'expiration d'un délai d'un an suivant la date de sa réception par le dépositaire ou à toute date ultérieure qui peut être spécifiée dans la notification de dénonciation ». Les Etats-Unis remplissent-ils aujourd’hui la condition restrictive posée dans cet article ? Cela ne fait aucun doute puisque l’article 2A concerne la production de CFC et qu’il est respecté par les Etats-Unis depuis son entrée en vigueur.

    • Ensuite, il n’est pas inutile de revenir sur la définition de la dénonciation. Il est généralement accepté qu’elle est constituée par l’acte unilatéral d’un Etat de se délier de ses engagements. La question peut donc se poser de savoir si le vote par le Congrès américain du projet de loi concernant le bromure de méthyle pourrait être assimilé à cet acte unilatéral. Ce n’est pas évident. Première objection : la dénonciation doit répondre à certains critères de forme et de procédure. Elle doit notamment être notifiée aux autorités compétentes. Cela signifierait que les Etats-Unis devraient officiellement informer le secrétariat du Protocole. Deuxième objection : le vote d’une loi contraire aux engagements internationaux d’un Etat ne saurait constituer un acte clair de dénonciation. Si la loi était votée, faudrait-il en conclure que les Etats-Unis n’ont plus l’intention de respecter la totalité de leurs engagements en vertu du Protocole ? Ou bien, à l’opposé, ce vote n’aurait-il de conséquences que vis-à-vis des engagements concernant le bromure de méthyle ? Assimiler ce vote à une dénonciation reviendrait donc à rejeter en bloc tous les efforts d’application entrepris par les Etats-Unis pour respecter leurs obligations. Or, il n’est pas ici inintéressant de rappeler que depuis l’origine du Protocole, les Etats-Unis ont été un des piliers moteurs de la protection de la couche d’ozone. Ils ont toujours veillé à respecter leurs engagements. Aujourd’hui, les Etats-Unis auraient d’autant moins intérêt à dénoncer la totalité du Protocole, que, comme vu précédemment, de nombreuses substances de remplacement sont déjà disponibles et commercialisées.

    • Il ne nous semble pas possible de dire que le vote du projet de loi pourrait être assimilé à une dénonciation juridique du Protocole, car il ne correspond pas complètement à sa définition. Cependant, ce comportement pourrait constituer une violation de leurs obligations, qui pourrait être assimilée à une dénonciation de facto de leurs obligations concernant le bromure de méthyle. Le seul intérêt que pourrait présenter le comportement américain repose dans la mise en œuvre du mécanisme de contrôle prévu, qui n’a jamais été appliqué entièrement. Il constituerait probablement la réponse la plus adaptée au vote du projet de loi.

  • La question la plus importante concerne la mise en œuvre du mécanisme de contrôle élaboré dans le cadre du Protocole. Une autre des raisons invoquées pour expliquer le bon fonctionnement jusqu’ici du Protocole de Montréal tient à l’existence d’une procédure de contrôle visant à vérifier que les Etats respectent leurs obligations. La particularité de cette procédure est qu’elle peut aboutir à la prise de sanction à l’égard d’un Etat. Les décisions allant dans ce sens sont susceptibles d’être adoptées par l’ensemble des Etats à l’occasion d’une réunion des Etats parties. Des réponses graduelles peuvent être adaptées en fonction des raisons expliquant que l’Etat ne se conforme pas à ses engagements. Si l’Etat est de bonne foi, c’est-à-dire s’il a tout mis en œuvre pour respecter ses obligations, mais qu’il n’y parvient pas, il peut se voir accorder une assistance qui peut relever d’ordre très varié – financière, juridique, technique, etc. Même dans ce cas, la réunion des Etats parties peut réagir en adoptant des mises en garde à l’égard d’un Etat. Jusqu’à maintenant, la pratique révèle que les diverses réunions des Etats parties ne sont jamais allées au-delà de ce type de mesures. Cependant, la procédure peut également aboutir à la prise de sanction contre un Etat. Pour ce qui concerne les Etats-Unis, il ne fait aucun doute que son comportement révélerait une mauvaise foi notoire dans l’application de ses obligations en vertu de l’article 2H si jamais le projet de loi était voté. Il serait donc tout à fait possible que des mesures puissent être prises contre les Etats-Unis au titre de cette procédure. Il est difficile de dire si ces mesures pourraient aboutir à la prise de sanction, car ce type de mesures n’a jamais été adopté. Le comportement américain – s’il est confirmé – peut constituer un précédent fâcheux, « invitant » d’autres Etats à faire de même. Cela pourrait provoquer la dislocation du Protocole, en remettant en cause de manière très profonde l’équilibre du Protocole.

En guise de conclusion, il semble donc possible de dire que les Etats-Unis s’orientent aujourd’hui vers un unilatéralisme généralisé qui trouve également à s’appliquer dans le domaine des conventions du droit international de l’environnement. Quel est alors l’avenir des instruments multilatéraux existant dans ce domaine ? Comme le montrent les réflexions développées suite aux dernières négociations menées dans le cadre des instruments juridiques sur les changements climatiques, la coopération internationale peut-elle valablement se passer des Etats-Unis qui sont un acteur incontournable ? Les autres Etats ou groupes d’Etats et notamment l’Union européenne ont-ils vraiment les moyens d’imposer à leurs industries de nouvelles contraintes qui risquent de susciter des distorsions de concurrence par rapport aux autres entreprises sur lesquelles ces nouvelles contraintes ne pèseront pas ? Une chose est sûre : les négociations semblent aujourd’hui au point mort. Il reste à espérer que les Etats-Unis sauront entendre la voix de la raison.

 

 

Thierry Vaissière

thvais@wanadoo.fr

Décembre 2003

 

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