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Actualité du droit international de l'environnement :

Événements récents et actualité des conventions internationales.

 

par Thierry Vaissière (10 décembre 2001)

 

I. – Événements récents

 

Dans plusieurs articles parus les 6 et 7 novembre 2001, Le Monde indiquait que la société Total Fina Elf a été mise en examen dans l’affaire du naufrage de l’Erika, pour les motifs de « pollution maritime » et de « complicité de la mise en danger de la vie d’autrui ». Dans le cadre de cette affaire, la société n’est pas la seule à avoir été mise en examen : le capitaine, l'armateur, le gestionnaire du bateau, trois représentants de la préfecture maritime, un responsable du centre de surveillance, la société de classification et un de ses dirigeants le sont déjà. Le juge d’instruction a accompagné cette mise en examen de plusieurs mesures dont le placement sous contrôle judiciaire de la société (dépôt d’une caution de 50 millions de francs). De plus, le juge a également obligé la société à ne plus transporter du fioul lourd numéro 2, substance justement chargée sur l’Erika. À côté des mesures prises à l’encontre de la société elle-même, un certain nombre de cadres ont également été mis en examen.

 

C’est sur la base du rapport d’expertise portant sur le naufrage que le juge tentera d’établir les différentes responsabilités en cause. Le rapport estime notamment que le naufrage et la pollution n’avaient rien d’inéluctables, mais qu’ils ont été rendus possibles en raison de l’existence de facteurs aggravants.

 

Le service du contrôle interne de la qualité propre à la société est ainsi remis en cause. Il avait notamment délivré un agrément valable pour une année, ce dernier s’achevait le 21 novembre 1999, alors que le navire avait quitté Dunkerque le 8 décembre 1999. À la même époque, plusieurs compagnies pétrolières concurrentes avaient refusé d’affréter le navire.

 

Le choix du navire par la société est également discuté. Il semble en effet que le navire avait dû subir des réparations à plusieurs reprises, concernant notamment la coque. Selon le rapport, Total Fina Elf ne pouvaient pas ne pas savoir.

 

Un élément intéressant de l’affaire portera sur la qualification de la responsabilité de la société, à qui le commandant devait rendre des comptes, et cela de manière plus importante que dans les contrats habituels d’affrètement.

 

Le comportement de la société, une fois qu’elle a eu connaissance du naufrage, est également questionné. Première bizarrerie, la société aurait été informée plusieurs heures après la survenance du dommage. Une fois la nuit tombée, le rapport suggère que la société aurait pris la direction des opérations, ce qu’elle nie. Dans ce cas, elle pourrait encourir des responsabilités encore plus lourdes, d’autant que la France n’a pas été immédiatement mise en courant de la situation, et notamment de la perte de pétrole à la mer, de la pollution et des fissurations du pont.

 

Enfin, signalons plusieurs autres éléments venant compléter les informations sur cette affaire. Jusqu’à maintenant, le FIPOL a débloqué 1,2 milliard de francs. Un rapport du Conseil économique et social estime que le coût total de la marée noire pourrait aller de 3 à 6 milliards de francs. Par ailleurs, nous avions déjà indiqué dans une précédente chronique les difficultés de traitement des déchets ramassés sur les côtes, en raison de la présence de boues dans le pétrole (voir chronique précédente).

 

 

II. – Actualité des conventions du droit international de l’environnement

 

L’actualité dans le domaine du droit international de l’environnement a été particulièrement riche ces derniers temps, avec la tenue d’un nombre important de conférences d’Etats parties à plusieurs instruments multilatéraux. Une fois de plus, l’actualité a été marquée par les avancées des négociations dans le domaine des changements climatiques, afin de permettre la mise en œuvre du Protocole de Kyoto. D’un point de vue plus général sur l’ensemble des négociations en cours, il est remarquable que la plupart des discussions actuelles ont trait à la mise en application de tous ces instruments. Elle est notamment envisagée grâce à la mise en place de mécanismes de contrôle, prenant des formes variées, mais allant tous dans le même sens : le renforcement de la vérification des obligations des Etats, évolution qui nous paraît très positive en ce qu’elle reflète le sérieux des engagements des Etats dans ce domaine.

 

La 7e conférence des Etats parties aux instruments sur les changements climatiques s’est tenue à Marrakech, au Maroc, des 29 octobre au 9 novembre 2001.

 

La 2nde partie de la 6e conférence des Etats parties avait laissé un certain nombre de questions en suspend, car un accord n’avait été trouvé que sur certaines questions (voir notre chronique précédente), et de plus, nombre de problèmes politiques devaient encore être résolus. Les textes encore en cours de discussion sont les suivants : mécanismes du respect des obligations notamment, l’utilisation des sols, et des modifications survenues dans l'utilisation des sols et de la foresterie. L’un des enjeux les plus importants de la 7e conférence était d’arriver à un nombre suffisant de ratifications du Protocole de Kyoto, afin que celui-ci soit mis en œuvre avant la tenue du sommet sur le développement durable qui se tiendra à Johannesburg en septembre 2002. C’est surtout l’Union européenne et le groupe des 77, rejoints par la Chine, qui ont poussé les négociations afin de favoriser l’émergence d’un accord. Certains pays ont ainsi pu imposer une partie de leurs positions, car ils étaient bien conscients que l’accord n’aurait pas de signification sans eux, d’autant que nul ne l’ignore, les Etats-Unis n’avaient pas changé de position ; l’accord se ferait donc de toute façon sans eux.

 

Comme nous le signalions plus tôt, c’est surtout la mise en œuvre du contrôle des obligations des Etats qui a fait l’objet de la plupart des discussions. Même s’il est possible d’être, de bien des points de vue, déçu de l’accord obtenu, il n’en reste pas moins que certains points sont maintenant clairement acquis. Entre autres, il n’y a plus de doute quant au caractère juridiquement contraignant que revêtiront les décisions prises par l’institution chargée du contrôle des obligations étatiques. C’est à la réunion des Etats parties qu’il appartiendra de se prononcer sur les choix des compétences dont disposera cette institution. L’existence d’institutions dans diverses conventions internationales de protection de l’environnement servira probablement d’inspiration aux Etats.

 

La 13e réunion des Etats parties au Protocole de Montréal sur les substances qui appauvrissent la couche d’ozone s’est tenue à Colombo au Sri Lanka des 16 au 19 octobre 2001.

 

Nous ne reviendrons ici que sur certaines décisions prises par la réunion des Etats parties, concernant également les problèmes de non-respect par certains Etats de leurs obligations en vertu du Protocole. Dans son rapport, le Comité d’application, organe chargé de surveiller les Etats, notait qu’il avait demandé au secrétariat de prendre des mises en garde et de demander des explications à 24 Etats parties en situation de non-conformité. D’après le paragraphe 5 de l’annexe IV de la quatrième réunion des Etats parties au protocole, les réunions des Etats parties au Protocole ont la possibilité de prendre différents types de mesures, déterminées en quelque sorte suivant la gravité du non-respect.

 

Les problèmes envisagés par la conférence des Etats parties sont très intéressants, à plus d’un titre. Tout d’abord, il est nécessaire de rappeler que jusqu’à maintenant, ce furent uniquement des Etats  parties de l’Europe de l’Est et issus de l’éclatement de l’URSS qui ont été l’objet de décisions concernant leur non-respect avec les dispositions du Protocole. Les obligations d’interdiction de la consommation et de la production des matières appauvrissant la couche d’ozone jouent de manière différente pour les Etats en développement, qui pouvaient bénéficier de clauses dérogatoires – ce qui demeure possible, mais devient plus difficile. Il n’en demeure pas moins qu’un nombre important de pays de l’Europe de l’Est sont toujours concernés par ces questions de non-conformité.

 

Des mises en garde ont été adressées aux Etats parties suivants : le Bangladesh, le Tchad, les Comores, la République dominicaine, le Honduras, le Kenya, la Mongolie, le Niger, le Nigeria, Oman, la Papouasie Nouvelle-Guinée, le Paraguay, Samoa et les Iles Salomon. Tous étaient en situation de non-conformité avec les mesures de réduction et de contrôle. Aucune sanction n’a encore été prise à ce jour, même s’il n’est pas exclu que cela soit fait dans le futur.

 

Pour tous les autres Etats concernés par des situations de non-conformité, l’évolution de la mise en conformité de leur législation avec les dispositions du Protocole est suivie de près par le Comité d’application. Aucun de ces Etats n’a fait l’objet de sanctions : il s’agit de la Fédération de Russie, de l’Arménie, du Kazakhstan, du Tadjikistan, de l’Argentine, de Belize, du Cameroun, de l’Ethiopie et du Pérou.

 

Enfin, notons qu’il est question d’élaborer des règles communes permettant de lutter contre le trafic illégal des substances réglementées par le Protocole.

 

Pour conclure sur cet instrument, nous ne pouvons que demeurer interdits quant à la très grande efficacité avec laquelle les Etats sont surveillés dans la mise en place de leurs obligations. Il ne fait pas de doute que, de ce point de vue, le Protocole constitue bel et bien une exception du droit international de l’environnement qui demeure pour le moment mal appliqué.

 

 

La deuxième réunion du Comité intergouvernemental pour le Protocole de Carthagène sur la biosécurité s’est déroulée à Nairobi, au Kenya des 1 au 5 octobre 2001.

 

Ce comité avait été créé par la conférence des Etats parties à la Convention sur la diversité biologique, après l’adoption du Protocole de Carthagène, afin de préparer la première réunion des Etats parties.

 

Les Etats doivent examiner un certain nombre de points importants parmi lesquels la responsabilité et la compensation ; le suivi et l'élaboration des rapports ; les directives devant être fournies au mécanisme financier; le règlement intérieur, etc. Rappelons que la principale disposition du traité concerne en l’instauration d’un mécanisme d’accord préalable en connaissance de cause, pour les importations d’OGM. Actuellement, le Protocole compte 103 Etats signataires, il a été ratifié uniquement par 5 Etats. Les points les plus importants n’ont pas été résolus. Les délégués en ont discuté et ont préféré que les discussions se poursuivent essentiellement après l’entrée en vigueur du Protocole.

 

 

La 5e conférence des Etats parties à la Convention sur la lutte contre la désertification s’est tenue au siège des Nations Unies, à Genève en Suisse des 1er au 12 octobre 2001.

 

Comme pour les autres instruments dont nous venons de parler, les questions devant être examiné par la conférence avaient également trait à la mise en place de mécanismes de contrôle des obligations des Etats : il en était ainsi de l’élaboration de procédures nécessaires à l’évaluation de la mise en œuvre de la Convention, grâce à la création de mécanismes particuliers. Le principal résultat de la conférence consiste en la création d’un Comité chargé de l’évaluation de la mise en application de la Convention, qui devrait se réunir d’ici à novembre 2002 (voir le rapport de la Conférence). En revanche, les questions portant sur la création d’un mécanisme de contrôle sont restées en suspend ; d’ailleurs, il n’était nullement à l’ordre du jour que ces problèmes soient réglés maintenant, en raison du besoin des groupes régionaux de se rencontrer pour déterminer un accord dans ce domaine. Quoi qu’il en soit, ce débat risque d’être intéressant à suivre, car il devrait permettre d’éclairer certaines dispositions de la Convention, notamment quant à leurs effets juridiquement contraignants.

 

 

Thierry Vaissière

thvais@noos.fr

10 décembre 2001

 

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