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LE COMITE 
CONTRE LE TERRORISME 
ET LA RESOLUTION 1373 (2001) DU CONSEIL DE SECURITE 
  
par 
Walter Gehr
Consultant de l’Office des Nations Unies contre la 
drogue et le crime 
Ancien porte-parole du groupe 
d’experts chargé d’assister le Comité contre le terrorisme 
  
  
  
  
    
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Résumé : 
Après les événements du 11 
septembre, le Conseil de sécurité des Nations Unies a adopté la résolution 1373 
(2001) par laquelle il créa le Comité contre le terrorisme (CCT) chargé de 
suivre l’application de la résolution. Cet article reflète les diverses 
questions juridiques auxquelles le CCT a fait face. Un an après sa création, 
l’activité sans précédent qu’a déployée le CCT a été qualifiée d’« exemplaire » 
par le Secrétaire général des Nations Unies. 
 
Abstract : After the events of September 11, the United Nations Security 
Council adopted resolution 1373 (2001) through which it also established the 
Counter-Terrorism Committee (CTC). This Committee has the mandate to monitor the 
implementation of the resolution. This article reflects the various legal issues 
the CTC had to deal with. One year after its inception, the CTC’s unprecedented 
work has been called “exemplary” by the UN Secretary General. 
Impression
        et citations : Seule la version
        au format PDF fait référence.  | 
     
   
  
 
  
  
I. – LE CADRE INSTITUTIONNEL – LE COMITE CONTRE LE 
TERRORISME
  
  
Le 28 septembre 2001, le
Conseil de sécurité des Nations Unies a adopté la
résolution 1373 (la Résolution). 
  
La Résolution est basée sur le Chapitre VII de la
Charte des Nations Unies. Les décisions qu’elle incorpore sont donc 
juridiquement contraignantes vis-à-vis des Etats membres de l’Organisation des 
Nations Unies (ONU). 
Avec les douze conventions et protocoles internationaux contre le terrorisme, 
elle forme l'un des piliers de l’ordre juridique international pour la 
prévention et la répression du terrorisme. 
  
La Résolution créa le
Comité contre le terrorisme (CCT) 
dont le mandat est de suivre l’application de la Résolution avec l’aide d’une 
équipe d’experts indépendants. Le CCT est formé des 15 Etats membres qui siègent 
également au Conseil de sécurité. De ce fait, la manière dont le CCT interprète 
les dispositions de la Résolution équivaut à une interprétation quasiment 
authentique. 
  
La Présidence du CCT est assurée 
par l’Ambassadeur britannique Jeremy Greenstock. En 2002, les Vice-Présidences 
furent assumées par les Ambassadeurs Alfonso Valdivieso (Colombie), Jagdish 
Koonjul (Maurice) et Sergey Lavrov (Fédération de Russie). A la suite du départ 
de la Colombie et de Maurice du Conseil de sécurité fin 2002, leurs 
représentants furent remplacés par les Ambassadeurs de l’Angola et du Mexique. 
Le 4 avril 2003, la Présidence passera à l’Ambassadeur d’Espagne, Inocencio 
Arias. 
  
  
II. – LES TRAVAUX DU 
COMITE
  
  
La tâche du CCT n’est pas en premier lieu d’ordre 
politique, mais juridique. Le CCT ne souhaite pas intervenir dans des débats de 
politique quotidienne. Il n’a pas non plus l’intention de se substituer à 
d’autres instances nationales ou internationales qui prennent d’ores et déjà des 
mesures pratiques, de nature policière, sociale ou autre, liées directement ou 
indirectement au combat contre le terrorisme comme par exemple au sein d’INTERPOL 
ou de l’OACI. 
  
En revanche, le CCT se comprend comme l’organe 
principal de la communauté internationale appelé à aider les Etats  
  
-         
à améliorer leurs capacités législatives et 
institutionnelles, tant individuelles que collectives, dans la lutte contre le 
terrorisme, 
-         
à prévenir l’utilisation de leurs territoires à des 
fins terroristes en tant que refuges ou bases logistiques ou financières et, 
enfin 
-         
afin d’établir un réseau d’information et d’action 
bilatérale ou multilatérale. 
  
Le CCT est un organe unique au 
sein des comités établis par le Conseil de sécurité, puisqu’il ne traite pas 
d’une situation géopolitique particulière, mais d’un sujet général - à savoir le 
terrorisme. Il n’est pas non plus un comité de sanctions, voire un tribunal 
appelé à condamner les Etats qui manqueraient à leurs obligations. 
  
En particulier, le CCT ne doit 
pas être confondu avec le Comité concernant la situation en Afghanistan, établi 
en vertu de la
résolution 1267 (1999). 
  
Le CCT procède par programmes de 
travail successifs de 90 jours chacun. Pendant la première année de son 
existence, le CCT a accompli un travail sans précédent au sein de l’ONU, 
en brisant un double record : non seulement il a reçu plus de 280 rapports 
gouvernementaux 
- un chiffre jamais encore atteint -, mais encore a-t-il été en mesure de tous 
les analyser et d’y répondre. Le
Secrétaire général des Nations Unies, M. Kofi Annan, a ainsi qualifié le 
travail du CCT d’« exemplaire ». 
Exemplaire notamment par le volume des travaux et la profondeur de l’analyse qui 
a été faite des rapports gouvernementaux - qui contiennent parfois des extraits 
considérables de lois et de règlements nationaux. Cette analyse est assurée par 
les Vice-présidents du CCT au sein de trois sous-comités. 
  
Après réception des rapports, le 
CCT, à partir du mois de mars 2002, a envoyé aux gouvernements respectifs une 
série de questions et de commentaires dont le but principal fut de demander des 
clarifications. 
  
Dans les cas où les rapports ne 
contenaient pas des copies des lois et règlements nationales contre le 
terrorisme ou des explications suffisantes sur leurs contenus, le CCT demanda 
des informations supplémentaires à ce sujet, voire que leur soit communiqués les 
textes législatifs eux-mêmes. 
  
Ainsi, le CCT commença également 
à identifier les domaines où l’application de la Résolution fait défaut et à le 
signaler aux Etats concernés. Lors de cette première phase, un bon nombre de 
gouvernements semblent avoir sous-estimé à quel point le CCT était prêt à entrer 
dans les détails des diverses législations nationales. 
  
Les Etats obtinrent un délai de trois mois pour 
répondre à la première série de questions et de commentaires. Les deuxièmes 
rapports, 
envoyés en réponse à ceux-ci, commencèrent à parvenir au CCT dès le mois de mai 
2002. Sur la base de ces rapports, le CCT commença à procéder à un second examen 
de la mise en oeuvre de la Résolution par les États. Dans le cadre de cet examen 
- qui est actuellement en cours -, le CCT a l’intention de se montrer plus 
direct avec les États en leur signalant des lacunes dans la mise en oeuvre de la 
Résolution et en leur recommandant des mesures appropriées. 
Il examine aussi de façon prioritaire, 
  
-         
si les Etats ont mis en place les 
mesures législatives nécessaires afin d’assurer l’application de la Résolution, 
-         
s’ils ont ratifié les douze 
instruments internationaux pour la prévention et la répression du terrorisme, 
-         
et enfin, s’ils ont doté leurs 
pouvoirs exécutifs respectifs des moyens permettant à ces derniers de mener 
efficacement une lutte anti-terroriste. 
  
Puisqu’elle 
traite de tout l’éventail de mesures juridiques et administratives à prendre 
pour lutter contre le terrorisme, la Résolution demande un effort soutenu de 
mise en œuvre de la part de tous les Etats : vu son ampleur, le CCT ne s’attend 
pas à ce que les Etats soient en mesure de lui rendre compte d’une mise en œuvre 
exhaustive et, de fait, aucun Etat n’a été déclaré en conformité totale avec ses 
dispositions ; le CCT s’attend néanmoins à ce que tous les Etats renforcent 
leurs capacités de lutte contre le terrorisme. 
  
Dans le cas de non-respect de la Résolution, le CCT 
ne possède pas de pouvoir coercitif propre, mais il peut attirer l’attention du 
Conseil de sécurité (dont il est un organe) sur de telles situations. C’est le 
Conseil qui peut alors prendre les mesures qui lui semblent appropriées. Ces 
mesures peuvent être prises sur la base des chapitres VI 
et VII 
de la
Charte des Nations Unies. Or, avant de se pencher sur les cas de non-respect, 
le CCT préfère se concentrer sur les questions de création de capacité tout en 
donnant aux Etats le temps de se doter des lois et institutions nécessaires à la 
mise en œuvre de la Résolution. 
  
Dans un souci d’assurer la transparence de ses 
travaux, le CCT maintient un
site Internet 
d’où il est possible d’accéder à de nombreux documents tels que  
  
-         
la Résolution 1373 (2001), 
-         
les rapports gouvernementaux, 
-         
les programmes de travail, 
-         
les critères sur lesquels il juge si 
les dispositifs législatifs et institutionnels des divers Etats satisfont à la 
Résolution 
-         
ou encore la déclaration du
Haut-Commissaire aux Droits de l’Homme, M. Sergio Vieira de Mello, faite 
devant le CCT le 21 octobre 2002. 
  
  
III. - LES DISPOSITIONS 
DE LA RESOLUTION
  
  
C’est dans les paragraphes 1 à 3 que se trouvent les 
dispositions matérielles les plus importantes de la Résolution : elles 
contiennent les obligations dont tout Etat doit s’acquitter. 
Dans leur essence, ces paragraphes traitent, en particulier, 
  
-         
de la prévention et de la répression 
du financement du terrorisme (paragraphe 1), 
-         
de la prévention et de l’incrimination 
des actes de terrorisme (paragraphe 2) et 
-         
de la coopération internationale et de 
la ratification des douze conventions globales contre le terrorisme (paragraphe 
3). 
  
Au regard 
de l’équipe d’experts du CCT, le sous-paragraphe 2 (d) contient la disposition 
clef de la Résolution : lue dans son contexte - et surtout conjointement avec le 
sous-paragraphe 2 (e) -, celle-ci oblige chaque Etat à incriminer sur son 
territoire tout financement, toute préparation ou toute perpétration d’actes de 
terrorisme visant d’autres Etats ainsi que leurs citoyens. Elle vise donc à 
contrecarrer le terrorisme international.  
  
Notons que, contrairement aux paragraphes 1 et 2, le 
paragraphe 3 de la Résolution n’est pas introduit par la formule « [le 
Conseil de sécurité] décide que tous les Etats », mais par « [le 
Conseil de sécurité] demande à tous les Etats ». Une lecture 
positiviste de
l’article 41 de la Charte des Nations Unies favorise l’interprétation selon 
laquelle seules les décisions du Conseil sont juridiquement contraignantes. Les 
« simples » demandes seraient alors dépourvues de cette qualité. En suivant 
cette interprétation, les sous-paragraphes 3 (a) à (g) et notamment la demande 
« de devenir dès que possible parties aux conventions et protocoles 
internationaux relatifs au terrorisme » 
(sous-paragraphe 3 (g)) n’obligent pas les Etats à y donner suite. Or, la 
volonté politique du Conseil de sécurité exprimée dans le paragraphe 3 de la 
Résolution est sans équivoque et l’importance que le CCT attribue à ce 
paragraphe ne se distingue guère de celle qui revient aux paragraphes qui le 
précèdent ; de fait, le CCT suit l’application de toute la Résolution, y compris 
le sous-paragraphe 3 (g), qu’il considère d’ailleurs comme un des éléments 
importants.
 
  
C’est dans le domaine de la ratification des 12 
conventions et protocoles relatifs au terrorisme que, pour le moment, le CCT a 
obtenu les résultats les plus tangibles : alors que seuls 2 pays avaient ratifié 
toutes ces conventions en été 2001, leur nombre s’est élevé à 24 un an après la 
création du CCT. En outre, il ressort clairement des rapports gouvernementaux 
envoyés au CCT que, depuis l’adoption de la résolution 1373 (2001), un nombre 
important d’Etats a promulgué, ou est en train de mettre en place, des lois 
spéciales contre le terrorisme.
 
  
Sans être une disposition demandant une action 
spécifique de la part des Etats, le paragraphe opératif 4 a été commenté 
explicitement dans les rapports de plusieurs Etats. Ce paragraphe établit un 
lien entre le terrorisme international d’une part, et la criminalité 
transnationale organisée, la drogue illicite, le blanchiment d’argent, le trafic 
d’armes et le transfert illégal de matières nucléaires, chimiques et biologiques 
d'autre part. Les structures que le CCT contribue à mettre en place dans le 
cadre de la lutte contre le terrorisme renforceront sans doute aussi les 
capacités des Etats à lutter contre toutes les formes de criminalité 
internationale. 
  
  
IV. – LES QUESTIONS D'APPLICATION
  
  
La
résolution 1373 (2001) est le reflet des nombreux aspects légaux de la lutte 
contre le terrorisme. Les questions d’application décrites ci-dessous ne sont 
donc qu’un choix parmi celles qui attirent l’attention des Etats membres du CCT. 
  
  
A. - La définition du terrorisme
  
  
En 1996, L’Assemblée générale des Nations 
Unies créa par la
résolution 51/210 du 17 décembre 1996 un 
Comité spécial 
chargé d’élaborer des mesures visant à éliminer le terrorisme international. 
Ce Comité spécial est chargé, entre autre, d’élaborer une convention générale 
sur le terrorisme international. 
En octobre 2002, une définition du terrorisme trouva un très large appui au sein 
des membres du Comité spécial. 
Cette définition est essentiellement inspirée par l’article 2 de la
Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme. 
Néanmoins, l’on ne put se mettre d’accord sur les deux questions suivantes : 
  
-         
si les dispositions de la future 
convention générale devait l’emporter sur les dispositions d’un autre traité 
applicable en la matière (article 2 bis) et 
-         
si celles-ci seraient applicables en 
temps de conflit armé et dans une situation d’occupation étrangère. 
  
Face à ces difficultés, le CCT, quant à lui, adopta 
une attitude pragmatique. C’est ainsi qu’il ne voulut jamais intervenir dans les 
débats du Comité spécial. En outre, le Président du CCT déclara que le CCT 
considérera comme un acte de terrorisme ce que ses membres considéreront à 
l’unanimité être un tel acte. Ses membres sont, rappelons-le, identiques à ceux 
du
Conseil de sécurité, l’organe des Nations Unies auquel incombe la 
responsabilité principale du maintien de la paix et de la sécurité 
internationales. 
Enfin, la tâche du CCT s’avéra être suffisamment concrète pour pouvoir se passer 
de la résolution de tous les problèmes liés à la définition du terrorisme. 
  
La Résolution ne laisse planer aucun doute quant à 
la gravité des actes de terrorisme puisqu’elle les qualifie de « contraires 
aux buts et aux principes de l’Organisation des Nations Unies ». 
  
  
B. - Le gel de fonds
  
  
Après les attentats du 11 septembre à New 
York, Washington et en Pennsylvanie, la coopération internationale dans le 
domaine juridique se concentra sur le gel de fonds appartenant à l’organisation 
Al-Qaida ainsi qu’à des personnes et entités associées. 
Le sujet du gel 
de fonds de terroristes est repris par la
résolution 1373 (2001), sans pour autant qu’une liste de personnes ou 
entités désignées y soit attaché. L’obligation de geler des fonds et autres 
avoirs financiers de terroristes est donc générale et ne vise pas des personnes 
ou des groupes particuliers. La 
Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme 
contient une disposition comparable 
tout en donnant une définition très large du terme « fonds ». 
  
Vu que le sous-paragraphe 1 (c) de la Résolution 
demande aux Etats de geler « sans attendre » les fonds suspects, ils 
doivent mettre en place une procédure d’urgence qui le leur permette. De plus 
faut-il que chaque Etat soit capable de geler des fonds sur demande d’un autre 
Etat. 
Puisque la Résolution n’a pas de champ d’application géographique restreint, 
l‘origine géographique d’une telle demande ne doit pas être, à elle seule, la 
raison d’un refus de la part de l’Etat sollicité. Beaucoup de pays devront 
amender leurs législations afin de pouvoir se trouver en conformité avec ces 
obligations. 
  
  
C. - Le contrôle des transferts de fonds
  
  
Hormis le gel de fonds, la Résolution demande non 
seulement de manière catégorique que tous les Etats « préviennent et 
répriment le financement des actes de terrorisme », 
mais encore qu’ils interdisent la mise à disposition directe ou indirecte de 
capitaux à des personnes impliquées dans de tels actes. 
Dans son article 18, la
Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme 
enjoint les Etats à prévenir le financement du terrorisme par divers moyens, 
notamment par la mise en place d’obligations pour les institutions financières 
telles que  
  
-         
l'identification de leurs clients et 
-         
le prompt 
signalement aux autorités compétentes de toutes les opérations complexes, 
inhabituelles, importantes, et de tous les types inhabituels d'opérations, 
lorsqu'elles n'ont pas de cause économique ou licite apparente. 
  
Essentiellement, ces mesures ne 
diffèrent pas de celles qui sont préconisées dans le cadre de la lutte contre le 
blanchiment de capitaux. 
Toutefois, les obligations des institutions financières doivent aller au-delà de 
celles-ci et viser spécifiquement le financement du terrorisme. 
 
  
Ainsi, dans le contexte du 
sous-paragraphe 1 de la Résolution, les Etats doivent veiller à ce que ces 
institutions ainsi que leurs dirigeants et employés informent, de leur propre 
initiative, les autorités de tout fait qui pourrait être l'indice d'un acte de 
financement de terrorisme. 
Pour être efficace, l’obligation 
de ces personnes de signaler à leurs autorités les opérations financières 
suspectes doit être accompagnée de peines appropriées en cas de manquement. Le 
paragraphe opératif 5 de la Résolution énumère le financement du terrorisme 
effectué en connaissance de cause parmi les actes contraires aux buts et 
principes de l’ONU.  
  
Or, les institutions financières 
ne sont pas les seules à pouvoir contrecarrer des actes de terrorisme en 
signalant des opérations suspectes aux autorités. En fait, toutes les 
professions intervenant dans des opérations financières comme, par exemple, les 
experts-comptables externes, les avocats, les notaires et les conseillers 
fiscaux sont dans une situation comparable. 
Les obligations d’information doivent donc être étendues à ces personnes. 
  
Bien entendu, les obligations 
d’identification de la clientèle et d’avertissement doivent être applicables à 
ce que l’on appelle les « systèmes ou réseaux informels de transfert de fonds », 
« réseaux bancaires informels » 
ou encore « hawala » 
qui opèrent en dehors du cadre législatif ou réglementaire des Etats. 
  
  
D. - Les organisations à but non-lucratif
  
  
La
résolution de l’Assemblé générale 51/210 de 1996 mentionnée ci-dessus avait 
déjà soulevé dans son sous-paragraphe 3 (f) 
le problème posé par certaines organisations qui ont ou prétendent avoir un but 
caritatif, culturel ou social. L’on sait que plusieurs d’entre elles ont financé 
des activités terroristes et continuent sans doute de le faire. 
De leur côté, la
résolution 1373 (2001) du Conseil de sécurité demande que tous les Etats « préviennent 
et répriment le financement des actes de terrorisme » 
et la
Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme 
enjoint les Etats parties de coopérer en « interdisant sur leur territoire 
les activités illégales de personnes et d'organisations qui, en, connaissance de 
cause, encouragent, fomentent, organisent ou commettent » des infractions 
relatives au financement du terrorisme. 
  
Afin que ces dispositions soient 
mises en œuvre de manière efficace, il est nécessaire que les Etats contrôlent 
les organisations à but non lucratif dont il est souvent facile d’abuser. Ils 
doivent donc se doter d’un dispositif législatif adéquat ainsi que 
d’institutions capables de détecter et de réprimer le détournement de fonds. 
  
Vu les dispositions des 
sous-paragraphes 2 (f), 3 (b) et 3 (c) de la Résolution, ces mesures devront 
être complétées par des actes de coopération internationale telle que la 
conclusion d’accords internationaux facilitant la vérification de l’emploi de 
fonds de ces organisations au delà des frontières nationales ou régionales. 
  
  
E. - L’incrimination des 
actes de terrorisme 
  
  
Une des tâches prioritaires du CCT 
consiste à surveiller la ratification et l’application des douze conventions et 
protocoles internationaux contre le terrorisme. 
Dix de ces instruments 
obligent les Etats qui y sont liés à ériger en infractions pénales les 
infractions qui y sont définies. En outre, la Résolution oblige les Etats 
d’ériger en crime le financement, l’organisation, la préparation et la 
perpétration d’actes de terrorisme 
et ceci indépendamment des conventions et protocoles. 
  
En ce qui concerne l’incrimination du financement du 
terrorisme, beaucoup de rapports présentés au CCT répondent que cet acte a déjà 
fait l’objet d’une incrimination par le biais des lois sur le blanchiment de 
capitaux. Il a donc fallu rappeler aux Etats que bien que le blanchiment 
d’argent et le financement du terrorisme soient des crimes apparentés, ils sont 
néanmoins distincts : alors que le blanchiment consiste à retraiter ces produits 
d’origine criminelle 
pour en masquer l’origine illégale, 
le terrorisme peut être financé par des voies a priori tout à fait légales comme 
par exemple par des profits d’entreprise ou par des collectes effectuées par des 
organisations non gouvernementales ou à but non lucratif. 
  
Surtout, beaucoup de pays ne semblent pas avoir 
incriminé un des actes visés par l’article 2 (1) de la
Convention internationale pour la répression du financement du terrorisme, à 
savoir celui de réunir des fonds dans l'intention de les voir utilisés en vue de 
commettre un acte de terrorisme. Cet acte préparatoire doit être incriminé, même 
s’il n’y a pas eu tentative ou consommation de l’acte terroriste menant 
directement à des pertes de vies ou de biens. 
  
Outre l’incrimination du financement du terrorisme, 
le sous-paragraphe 2 (e) de la Résolution enjoint les Etats à veiller à ce que 
« toutes personnes qui participent […] à l’organisation [ou] à la préparation 
[…] d’actes terroristes soient traduites en justice […] ». Il faut donc que 
ces actes préparatoires soient incriminés. Le sous-paragraphe 2 (a) demande, 
quant à lui, la répression du « recrutement de membres de groupes terroristes ». 
L’incrimination de tous ces actes est l’un des moyens les plus efficaces pour 
prévenir des actes de terrorisme violents. Il est d’ailleurs reconnu qu’en 
général, le droit pénal a un rôle important à jouer dans la prévention et la 
dissuasion. 
  
  
F. - La compétence universelle pour les actes de terrorisme
  
  
La Résolution et les douze conventions 
consacrent le principe « aut dedere aut judicare » (« extrader ou 
juger ») ou plutôt du « aut dedere aut prosequi » 
(« extrader ou poursuivre »). 
En effet, la Résolution oblige les Etats à veiller 
d’une part 
  
« […] à ce que toutes personnes qui 
participent au financement, à l’organisation, à la préparation ou à la 
perpétration d’actes de terrorisme ou qui y apporte un appui soient traduites en 
justice […] » 
  
et d’autre part 
 
  
« […] à ce que la revendication de 
motivations politiques ne soit pas considérée comme pouvant justifier le rejet 
de demandes d’extradition de terroristes présumés ». 
  
De leur côté, dix des douze 
conventions 
contiennent une obligation du type suivant :
  
« L'Etat 
contractant sur le territoire duquel l'auteur présumé de l'une des infractions 
est découvert, s'il n'extrade pas ce dernier, soumet l'affaire, sans aucune 
exception et que l'infraction ait ou non été commise sur son territoire, à ses 
autorités compétentes pour l'exercice de l'action pénale […]  ». 
  
Le fait que 
l’auteur d’un acte de terrorisme se trouvant sur le territoire d’un Etat doit 
être soit poursuivi, soit extradé, sans que le lieu où il l’a commis importe, 
répond au concept de « compétence universelle ». 
  
Comme les actes de terrorisme sont particulièrement 
graves, ils ne sont pas considérés comme des infractions politiques. 
En conséquence, une demande d'extradition ou d'entraide judiciaire fondée sur de 
telles infractions ne doit pas être rejetée pour la seule raison qu'elle 
concerne une infraction politique. 
  
Les auteurs 
présumés d’actes de terrorisme ne doivent pas non plus échapper à la règle du
« aut 
dedere aut prosequi » 
en formulant une demande d’asile politique. 
Ceci correspond à l’article 1er, paragraphe F de la
Convention de Genève relative au statut de réfugié suivant laquelle celle-ci 
n’est pas applicable aux personnes dont
« dont 
on aura des raisons sérieuses de penser […] qu’elles se sont rendues coupables 
d’agissements contraires aux buts et aux principes des Nations Unies ».
Or, en vertu du 
paragraphe opératif 5 de la
résolution 1373 (2001), les actes de terrorisme sont contraires à ces buts 
et principes. 
  
  
V. - ASSISTANCE
  
  
Deux mois après l’adoption de la Résolution, le 28 
novembre 2001, le Conseil de sécurité adopta une résolution complémentaire, à 
savoir la
résolution 1377 (2001), par laquelle il invita le CCT à examiner les moyens 
d’aider les Etats et, en particulier, à étudier la possibilité de faire appel 
aux programmes existants d’assistance en matière technique, financière, 
réglementaire, législative et autre, qui pourraient faciliter l’application de 
la
résolution 1373 (2001). 
  
A cette fin, le CCT nomma l’Ambassadeur Curtis Ward 
(Jamaïque). En outre, un Annuaire de programmes d’assistance contenant une liste 
d’Etats et d’organisations internationales prêts à offrir une telle assistance 
fut mis en ligne sur le
site Internet du CCT. 
  
Les conclusions d’un symposium sur le rôle de l’ONU 
dans la lutte contre le terrorisme, tenu les 3 et 4 juin 2002 avec la 
participation du président du CCT, 
menèrent à l’adoption, en octobre 2002, par le
Secrétariat des Nations Unies, d’un Programme global contre le 
terrorisme ; le mandat du
Centre des Nations Unies contre la drogue et le crime (ODC) y est défini. 
Quelques mois auparavant, le
Conseil économique et social des Nations Unies avait adopté une résolution 
demandant au Secrétaire général de l’ONU de rendre compte au CCT des activités 
de l’ODC dans la lutte contre le terrorisme et dans le but de renforcer un 
dialogue continu entre le CCT et l’ODC. 
  
L’ODC, basé à Vienne, vient donc de lancer un 
programme d’assistance juridique concernant l’application des douze conventions 
internationales contre le terrorisme 
et de la
résolution 1373 (2001). 
  
Notons enfin que la
résolution du Conseil de sécurité 1269 (1999) 
du 19 octobre 1999 « souligne le rôle décisif de l'Organisation des Nations 
Unies dans le renforcement de la coopération internationale destinée à lutter 
contre le terrorisme et souligne qu'il importe de resserrer la coordination 
entre États, organisations internationales et organisations régionales ». 
  
Le CCT reconnaît le rôle clef que jouent les 
organisations régionales dans le domaine du partage d’expertise et 
d’informations. Il a établi des relations avec un nombre important 
d’organisations régionales et a l’intension de les approfondir ; l’ODC le suit 
dans cette démarche. 
  
  
VI. – LE CCT ET LES DROITS DE L'HOMME 
  
  
Il n’est pas du ressort du CCT d’assurer le suivi 
d’instruments juridiques autres que la Résolution et les 12 conventions 
internationales contre le terrorisme. 
En particulier, la Résolution ne demande pas au CCT de suivre l’application de 
normes internationales relatives aux Droits de l’Homme. 
  
En outre, il n’y a pas de consensus au sein du 
Comité pour nommer un expert en Droits de l’Homme pour l’assister dans sa tâche. 
Cependant, le CCT est conscient des liens entre les Droits de l’Homme et ses 
travaux. C’est pour cela qu’il maintient des contacts avec le
Haut Commissaire aux Droits de l’Homme et qu’il salue l’examen de 
l’application des Droits de l’Homme dans les enceintes internationales créées à 
cet effet. Bien entendu, le CCT ne demanda jamais de prendre des mesures allant 
à l’encontre des Droits de l’Homme. 
  
Le CCT agit également de manière transparente, 
notamment grâce à des réunions d’informations de son Président, dont les résumés 
se trouvent sur le
site Internet du CCT, si bien que les organisations non gouvernementales 
sont en mesure d’exprimer leurs inquiétudes non seulement vis-à-vis du CCT, mais 
encore au sein d’institutions et d’organisations de défense des Droits de 
l’Homme. 
  
Dans son discours du 4 octobre 2002 devant le 
Conseil de sécurité à l’occasion du premier anniversaire du CCT, le
Secrétaire général des Nations Unies, M. Kofi Annan, 
dit que «[p]ar leur nature, les actes terroristes sont 
de graves violations des Droits de l”Homme. Par conséquent, rechercher la 
sécurité aux dépens des droits de l’homme fait preuve d’un manque de prévoyance 
et constitue est une contradiction en soi qui, à long terme, est vouée à 
l’échec». 
  
De son côté, le
Haut-Commissaire aux Droits de l’Homme, M. Sergio Vieira de Mello, déclara 
le 21 octobre 2002 devant le CCT que les Etats ont non seulement le droit, mais 
aussi le devoir, de protéger leurs citoyens contre le terrorisme. Néanmoins, il 
lui fit part de son inquiétude quant à un certain nombre de législations 
anti-terroristes qui, par leurs larges champs d’application, ouvrent la porte à 
des abus commis dans le but de réprimer des activités légitimes entreprises dans 
l’exercice de droits civils et politiques fondamentaux ; il put néanmoins 
confirmer qu’il n’y a aucune contradiction entre le respect des Droits de 
l’Homme et la mise en oeuvre de la résolution 1373 (2001). 
  
  
* * * 
  
   
  NOTES 
  NB : pour des raisons techniques, 
  les numéros des notes de bas de page sont décalés d'un numéro par rapport à la
  version PDF de l'article qui seule 
  fait foi. 
    
   
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  l’auteur en sa qualité personnelle et ne sauraient être imputées à aucune 
  autre personne, qu'elle soit de nature morale ou physique. Toutefois, l’auteur 
  décline toute responsabilité quant au contenu des sites vers lesquels des 
  liens externes ont été établis dans la version électronique de ce texte. Il 
  peut être contacté à travers son site Internet : 
  
  
  http://www.droit-international-public.net. 
   
   
   
   
   
  
  
  
   
  La Conférence diplomatique de 
  plénipotentiaires des Nations Unies sur la création d’une Cour criminelle 
  internationale qui adopta le Statut de la Cour pénale internationale le 17 
  juillet 1998, inséra dans
  
  l’Acte Final de la Conférence la résolution E qui recommande 
  l’organisation d’une conférence de révision afin d’étudier le cas des crimes 
  de terrorisme et des crimes liés à la drogue en vue de dégager une définition 
  acceptable de ces crimes et de les inscrire sur la liste de ceux qui relèvent 
  de la compétence de la Cour ; cf. Philippe Kirsch, 
  
  Terrorisme, crimes contre l’humanité et terrorisme international,
  sur le site Internet de la Coalition pour la Cour Pénale Internationale 
  (http://www.iccnow.org/francais/opinion.htm).
  
  
   
   
  
  
  
   
  Le 20 janvier 2003, le CCT avait reçu plus de 280 rapports de la part de 178 
  Etats.  
  
  
  
   Cf. 
  The Counter-terrorism Committee – Security Council contribution to the fight 
  against terrorism (Le Comité contre le terrorisme - La contribution du 
  Conseil de sécurité à la lutte contre le terrorisme, traduction de 
  l’auteur), brochure produite par la Mission Permanente du Royaume-Uni auprès 
  des Nations Unies à New York et distribuée avec l’assistance du Service 
  d’information de l’ONU.  
   
  
  
  
   
  Cf. le programme de travail du CCT pour la période allant du 26 juin au 23 
  septembre 2002.  
   
   
   
   
   
   
   
   
   
   
   
   
   
   
   
   
   
   
   
   
   
   
   
  
  
  
   
  Cf la
  
  déclaration du G-20 faite à l’issue de sa réunion du 16 et 17 novembre 
  2001. Le G-20 est un forum international composé des ministres des finances et 
  des gouverneurs de banques centrales de 19 pays, de l”Union européenne et des 
  institutions de Bretton Woods (Fonds Monétaire International et Banque 
  Mondiale).  
   
   
   
   
   
   
   
   
  
  
  
   
  Ces produits peuvent provenir des activités criminelles suivantes : les ventes 
  illégales d’armes, la contrebande, les activités de la criminalité organisée, 
  notamment le trafic de stupéfiants et les réseaux de prostitution, 
  l’escroquerie, les délits d’initiés, la corruption ou la fraude informatique.  
   
   
   
   
   
   
   
   
   
   
   
   
   
   
   
   
   
   
  
  
   
   
    
  
  
    
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Copyright : © 2003 Walter Gehr. Tous droits réservés. Impression
        et citations : Seule la version
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officiel de citation :  
GEHR Walter. - "Le Comité contre le terrorisme 
et la résolution 1373 (2001) du Conseil de sécurité". - Actualité et 
Droit International, janvier 2003. <http://www.ridi.org/adi>. 
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