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TRIBUNAL PÉNAL INTERNATIONAL POUR L'EX-YOUGOSLAVIE


2e semestre 2001

 

Le Procureur c. Miroslav Kvocka, Milojica Kos, Mlado Radic, Zoran Zigic et Dragoljub Prac, IT-98-30/1, Chambre de première instance I, Jugement, 2 novembre 2001

(sur le site du TPIY : Arrêt HTML | PDF - Communiqué de Presse N° 631)

 

par

Céline Renaut

Doctorante à l'Université de Paris Sud XI

 

 

Note : Les jugements et arrêts étant rarement disponibles en français, la décision a été prise de traduire les passages cités afin de faciliter la lecture de cette chronique (le texte original a été alors placé entre parenthèses ou en note). Les liens renvoient aux sites officiels.

 

 

Après la prise de la région de Prijedor (nord-est de la Bosnie-Herzégovine), les forces serbes, craignant un soulèvement de la population musulmane et croate, ouvrirent les camps d’Omarska, Keraterm et Trnopolje afin d’y regrouper les personnes suspectées d’appartenir à l’opposition. Celles-ci furent les victimes de traitements cruels et inhumains. A l’époque où le camp d’Omarska a été créé, Kvocka et Radic étaient des officiers de police rattachés au commissariat d’Omarska, Prcac un officier de police à la retraite mobilisé pour servir dans ce même commissariat, Kos et Zigic - respectivement serveur et chauffeur de taxi - étaient appelés en tant qu’officiers de réserve. Kvocka, Radic, Prcac et Kos eurent des fonctions liées à la sécurité et à l’administration du camp d’Omarska, sans toutefois être impliqués dans la décision d’établissement des camps ni dans la détermination de la politique officielle menée à l’égard des détenus.

 

Les charges retenues contre Kvocka, Prcac, Kos et Radic sont limitées aux crimes commis dans le camp d’Omarska. Quant à Zigic, qui a travaillé dans les camps d'Omarska, de Keraterm, et de Trnopolje, il est poursuivi pour des crimes commis dans chacun d’eux. La Chambre de première instance conclut à la culpabilité de Kvocka, Prcac, Kos et Radic pour crime de persécution (art. 5 du Statut), meurtre et torture (art. 3 du Statut) en tant que co-auteurs d’une entreprise criminelle conjointe et les condamne respectivement à une peine d’emprisonnement de 7, 5, 6 et 20 ans. Zigic est reconnu coupable de persécution, meurtre, torture et traitements cruels et condamné à une peine d’emprisonnement de 25 ans.

 

 

I. - Applicabilité des articles 3 et 5 du Statut du Tribunal pénal international pour l'ex-Yougoslavie (TPIY)

 

 

Concernant l’applicabilité de l’article 3 du Statut, la Chambre de première instance rappelle[1] : (1) que l’acte incriminé doit violer une règle du droit international humanitaire ; (2) que cette règle doit avoir un caractère coutumier ou, si elle émane d’un traité, que toutes les conditions requises pour son application doivent être réunies ; (3) que la violation en question doit être grave, autrement dit qu'elle doit porter sur une règle protégeant des valeurs importantes et entraîner des conséquences graves pour la victime ; et (4) que cette violation doit entraîner la responsabilité pénale de son auteur en vertu du droit international coutumier ou conventionnel (§ 123).

 

En l’espèce, les accusés sont poursuivis pour violations de l’article 3 commun aux Conventions de Genève de 1949. La Cour constate à cet égard que la jurisprudence du Tribunal a affirmé le caractère coutumier de cet article[2] et que s’ajoute une cinquième condition aux quatre citées ci-dessus pour que les violations de l’article 3 commun aux Conventions de Genève constituent un crime de guerre au sens de l’article 3 du Statut du TPIY, à savoir que les personnes victimes de ces violations n’aient pas participé directement aux hostilités[3] (§ 124).

La Chambre de première instance conclut finalement que tous les éléments requis pour l’application de l’article 3 du Statut sont réunis (§§ 125-126).

 

Pour déterminer si l’article 5 du Statut est applicable en l’espèce, la Chambre de première instance applique les critères dégagés par la Chambre de première instance II dans l’affaire Kunarac[4]. Ainsi la Chambre relève-t-elle l’existence d’une attaque généralisée ou systématique dirigée contre une population civile et constate-t-elle que les crimes commis dans le camp d’Omarska font partie d’une attaque dirigée contre une population civile avant de conclure à l’applicabilité de l’article 5 du Statut (§§ 128-130).

Reste alors à examiner si les éléments de chacun des chefs d’accusation sont réunis.

 

 

II. - Meurtre

 

 

La Chambre rappelle la définition du meurtre telle qu’elle apparaît dans la jurisprudence constante du TPIY et du Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR)[5] : le fait pour l’accusé, animé de l’intention de tuer la victime ou de lui infliger des blessures dont la gravité implique un risque de mort dans l’esprit de leur auteur, de causer par un acte ou une omission la mort de la victime (§ 132).

 

 

III. - Torture

 

 

La Chambre de première instance se range à l’argumentation de la Chambre de première instance II dans l’affaire Kunarac justifiant l’abandon des définitions de la torture données par le TPIY et le TPIR[6] et affirmant que l’acte de torture n’est pas nécessairement le fait d’un agent de l’Etat[7] (§ 139). La Chambre exprime aussi son accord avec la position de la Chambre de première instance II dans l’affaire Celebici, selon laquelle la liste des buts prohibés figurant dans la Convention contre la torture n’est pas exhaustive mais simplement exemplative[8]. A cet égard, elle note que la Chambre de première instance II dans l’affaire Furundzija a estimé que faisait partie des buts de la torture, conformément au droit international coutumier, le fait d’humilier la victime ou une tierce personne[9] (§ 140).

 

Ces éléments pris en compte, la Chambre décide d’appliquer au cas d’espèce la définition suivante de la torture (§ 141) :

« (i) la torture consiste à infliger, par un acte ou une omission, une douleur ou des souffrances aiguës, physiques ou mentales ;

(ii) l’acte ou l’omission est intentionnel ; et

(iii) la torture a pour but d’obtenir des renseignements ou des aveux, ou de punir, d’intimider, d’humilier ou de contraindre la victime ou une tierce personne ou encore de les discriminer pour quelque raison que ce soit »[10].

 

De concert avec la Chambre de première instance II et conformément à la jurisprudence relative aux droits de l’homme, la Chambre souligne que le caractère aigu des douleurs ou souffrances infligées est le caractère distinctif de la torture[11] (§ 142). Le degré de souffrance caractérisant la torture n’ayant pas été clairement défini, il convient de prendre en compte la gravité objective du traitement infligé. Des critères subjectifs tels que les conséquences psychologiques de l’acte incriminé sur la victime et, dans certains cas, certains facteurs comme l’âge, le sexe et l’état de santé de la victime sont également pris en compte dans l’évaluation de la souffrance infligée (§§ 143 et 149).

 

La Chambre relève que le Tribunal, inspiré par la jurisprudence des institutions protectrices des droits de l’homme[12], a considéré que le viol peut être assimilé à une douleur ou souffrance aiguë constitutive de torture à condition que les autres éléments constitutifs de la torture, notamment le but prohibé, soient réunis[13] (§ 145). Par contre, il n’est pas exigé que le dommage causé à la victime soit permanent (§ 148).

 

En l’espèce, pour déterminer si les accusés se sont rendus coupables de torture, la Chambre prend en compte l’atmosphère générale et les conditions de détention dans les camps, l’absence de soins médicaux après les mauvais traitements ainsi que le caractère répétitif et systématique des mauvais traitements infligés aux détenus. La nature, le but, la constance et la gravité de ces traitements sont également des indices de torture (§ 151).

 

Aucune des parties ne conteste que les détenus des trois camps aient été victimes de torture au sens de la jurisprudence du Tribunal. De plus, les faits, tels qu’exposés dans la 2ème partie du jugement (§§ 8-118), montrent que les mauvais traitements infligés aux détenus avaient pour but de les punir pour leur participation dans l’opposition armée aux forces serbes, d’obtenir d’eux des informations ou une confession, de les intimider, de les humilier ou encore de les discriminer. Aussi la Chambre conclut-elle que les mauvais traitements infligés aux détenus des trois camps sont constitutifs de torture au sens des articles 3 et 5 du Statut.

 

 

IV. - Traitements cruels

 

 

Interdits par l’article 3 commun aux Conventions de Genève de 1949, les traitements cruels ont été définis par le Tribunal comme des actes ou omissions intentionnels qui causent de graves souffrances ou douleurs, physiques ou mentales, ou qui constituent une atteinte grave à la dignité humaine[14] (§ 159). Comme la Chambre de première instance II dans l’affaire Celebici[15], la Chambre considère que le degré de souffrance exigé pour le traitement cruel est moins élevé que celui requis pour la torture mais équivalent à celui demandé pour le traitement inhumain, les notions de traitement cruel et de traitement inhumain étant considéré comme équivalentes[16] (§ 161).

 

En l’espèce, la Chambre a considéré que des traitements cruels, en particulier sous la forme de passages à tabac et de tentatives d’humiliation, ont été infligés aux détenus dans les trois camps (§ 164).

 

 

V. - Atteinte à la dignité des personnes

 

 

La Chambre rappelle que l’interdiction des atteintes à la dignité des personnes est une catégorie de la prohibition plus large des traitements inhumains contenue dans l’article 3 commun aux Conventions de Genève[17] (§ 166). Elle reprend ensuite la définition de l’atteinte à la dignité des personnes telle qu’elle apparaît dans la jurisprudence du Tribunal.

 

Le crime d’atteinte à la dignité des personnes est constitué lorsque l’accusé a intentionnellement commis ou participé à la commission d’un acte ou d’une omission qui est généralement perçu comme causant de graves humiliations ou comme étant une attaque grave contre la dignité humaine et lorsque l’accusé savait que son comportement aurait un tel effet[18] (§ 167). Peu importe que l’acte ou l’omission incriminé ait des conséquences durables ; il suffit que le comportement en cause soit considéré comme causant en principe de graves humiliations ou comme étant une attaque sérieuse contre la dignité humaine[19]. De plus, il n’est pas exigé que l’accusé ait eu l’intention d’humilier sa victime mais seulement qu’il ait eu conscience que son comportement pouvait provoquer de graves humiliations ou porter atteinte à la dignité humaine[20] (§ 168).

 

Au Procureur qui recherchait la condamnation des accusés pour meurtre en tant qu’atteinte à la dignité des personnes, la Chambre répond que le meurtre ne peut pas être considéré comme appartenant à cette catégorie de crime, car il implique la mort de la victime et se démarque ainsi des concepts d’humiliation graves ou d’atteinte à la dignité humaine (§ 172). A l’inverse, l’utilisation de détenus comme boucliers humains ou pour creuser des tranchées[21], les passages à tabac, le fait de faire vivre des détenus dans la crainte permanente d’être spoliés ou battus[22], le viol et les autres formes de violences sexuelles[23] entrent dans cette catégorie.

 

En l’espèce, la Chambre conclut que les détenus des trois camps ont subi des traitements dégradants et humiliants en raison des conditions de leur enfermement (§§ 173-174).

 

 

VI. - Viol

 

 

Le viol avait déjà été défini dans les affaires Akayesu[24] et Furundzija[25], mais la Chambre reprend la définition - plus large -, adoptée par la Chambre de première instance II dans l’affaire Kunarac. En effet, si la Chambre de première instance II a suivi la jurisprudence Furundzija en ce qui concerne l’activité sexuelle susceptible d’être incriminée – à savoir la pénétration sexuelle, fût-elle légère du vagin ou de l’anus de la victime par le pénis ou tout autre objet utilisé par le violeur ou de la bouche de la victime par le pénis du violeur – elle s’en est éloignée s’agissant des circonstances entourant cette activité. Tandis que le jugement rendu dans l’affaire Furundzija décrivait ces circonstances comme « l’emploi de la force, de la menace ou de la contrainte contre la victime ou une tierce personne », la Chambre de première instance II a considéré que le viol était constitué lorsque l’un des actes sexuels décrits ci-dessus a lieu sans le consentement de la victime[26] (§§ 176-177).

 

A cet égard, la Chambre de première instance II, qui avait déjà dit dans l’affaire Celebici que les conditions de coercition sont inhérentes aux situations de conflit armé[27], a précisé à l’occasion de l’affaire Furundzija que toute forme de captivité vicie le consentement[28]. En l’espèce, la Chambre fait siennes ces deux affirmations (§ 178).

 

L’élément psychologique du viol réside dans l’intention de l’auteur de l’acte sexuel de pénétrer la victime tout en sachant que la victime n’y consent pas (§ 179).

 

S’agissant des violences sexuelles, elles constituent une catégorie de crime plus large que le viol car elles visent « tout acte de nature sexuelle » qui est commis contre une personne dans des conditions de contrainte sur la victime[29]. Le contact physique n’est donc pas nécessaire pour cette catégorie de crime (§ 180).

 

En l’espèce, la Chambre estime que les femmes détenues dans les camps ont été victimes de viols et autres violences sexuelles au sens des articles 3 et 5 du Statut (§ 183).

 

 

VII - Persécution pour des motifs politiques, raciaux ou religieux

 

1. - Evolution de la notion de persécution

 

La Chambre rappelle l’évolution qu’a connue la définition de la persécution dans la jurisprudence du Tribunal. Celui-ci l’a tout d’abord définie, dans l’affaire Tadic, comme comprenant les trois éléments suivants : « (1) l’existence d’un acte ou d’une omission discriminatoire ; (2) cet acte ou omission a pour origine des motifs politiques, religieux ou  raciaux ; et (3) l’intention de porter atteinte à la jouissance d’un droit fondamental »[30]. Elle a ensuite été qualifiée, dans le jugement rendu dans l’affaire Kupreskic, de « déni manifeste ou flagrant, pour des raisons discriminatoires, d’un droit fondamental consacré par le droit international coutumier ou conventionnel, et atteignant le même degré de gravité que les autres actes prohibés par l’article 5 du Statut »[31]. Dans ce jugement, il était également précisé que les actes de persécution peuvent comprendre tous les actes énumérés aux autres alinéas de l’article 5 du Statut[32]. La jurisprudence ultérieure a ajouté que tous les crimes prévus par le Statut du TPIY peuvent entrer dans la catégorie des actes de persécution[33] ainsi que tous les actes qui ne figurent pas dans le Statut mais qui sont susceptibles d’entraîner le déni d’autres droits de l’homme fondamentaux lorsque ces actes, pris isolément ou dans leur ensemble, sont aussi graves que les autres crimes énumérés à l’article 5 du Statut[34]. Enfin, pour déterminer si des actes particuliers constituent une persécution, il convient de les évaluer « dans leur contexte et non pas isolément, en prenant en considération leur effet cumulatif. Même si les actes, pris individuellement, peuvent ne pas être inhumains, leurs conséquences globales doivent choquer l’humanité à un point tel qu’elles peuvent être qualifiées d’‘inhumaines’ »[35] (§§ 184-185).

 

De la jurisprudence des tribunaux de l’après seconde guerre mondiale, la Chambre conclut qu’un acte qui ne serait pas criminel en soi peut le devenir et être qualifié de persécution s’il est commis avec l’intention discriminatoire requise pour ce crime. Toutefois, ainsi que l’a souligné la Chambre de  première instance III dans l’affaire Kordic, le principe de légalité impose que les actes pour lesquels l’accusé est poursuivi pour persécution constituent des crimes en vertu du droit international au moment de leur commission[36]. En l’espèce, la Chambre de première instance I considère que ce rappel signifie que « les actes incriminés dans l’acte d’accusation doivent, conjointement ou séparément, équivaloir à un crime de persécution et non que chaque acte discriminatoire allégué doive être regardé individuellement comme une violation du droit international »[37] (§ 186).

 

La Chambre estime en outre que le crime de persécution, lorsqu’il repose sur les mêmes faits commis contre les mêmes victimes, subsume[38] les autres actes qui, pris isolément, constituent des crimes contre l’humanité, pourvu que l’intention discriminatoire pour des motifs politiques, raciaux ou religieux de l’auteur des actes soit établie (§ 187).

 

En l’espèce, les accusés sont poursuivis pour persécution du fait des actes suivants : meurtre, torture, passages à tabac, viols et violences sexuelles, harcèlement, humiliation, torture psychologique et détention dans des conditions inhumaines. Le meurtre, la torture et le viol étant expressément prévus par les alinéas (a), (f) et (g) de l’article 5 du Statut, leur qualification de crime de persécution, lorsqu’ils sont commis pour des motifs discriminatoires, ne pose pas de problème. De même, la détention dans des conditions inhumaines peut être incriminée comme persécution au titre des alinéas (e) (« emprisonnement ») et (i) (« autres actes inhumains ») de l’article 5 (§ 189).

 

L’humiliation (« humiliation »), le harcèlement (« harassment ») et la torture psychologique (« psychological abuse ») ne font pas partie des crimes spécifiquement énumérés par le Statut du Tribunal. A l’image du viol et de la nudité forcée qui ont été reconnus comme des crimes contre l’humanité ou des crimes de génocide[39], la Chambre estime que les traitements humiliants qui s’inscrivent dans une attaque dirigée contre une population civile peuvent, en association avec d’autres crimes, ou dans des cas extrêmes isolément, constituer des crimes de persécution (§ 190). De plus, les conditions de détention des détenus, estime la Chambre, étaient suffisamment dégradantes et traumatisantes pour être qualifiées d’atteinte à la dignité des personnes et partant de persécution eu égard à leur fondement discriminatoire. Le harcèlement et la torture psychologique sont donc également considérés comme des formes de persécution (§§ 191-192)

 

S’agissant de l’élément moral de la persécution, c’est-à-dire de l’intention discriminatoire des auteurs des actes de persécution, il se déduit en l’espèce du fait que la persécution était organisée par des Serbes ou sympathisants serbes exclusivement à l’égard de la population non serbe de Prijedor et de ses sympathisants (§ 196).

 

2. - Déduire l’intention discriminatoire de la participation en connaissance de cause à une entreprise criminelle

 

Dans cette affaire s’est posée la question de savoir si l’intention discriminatoire de l’auteur ou du co-auteur d’une infraction principale (« underlying offence ») ou d’une entreprise criminelle conjointe (« joint criminal enterprise ») peut se déduire de sa participation en connaissance de cause dans l’attaque discriminatoire ou l’entreprise criminelle (§ 199).

 

Dans le cas d’un crime de persécution, à l’intention de commettre l’acte principal (meurtre, torture, viol, etc.) s’ajoute l’intention spécifique de discriminer une population civile pour des motifs politiques, raciaux ou religieux. Cette intention discriminatoire s’inscrit donc en sus non seulement de l’intention de commettre l’acte principal mais aussi de l’intention requise pour les crimes contre l’humanité, c’est-à-dire le fait de savoir que l’acte est commis dans le cadre d’une attaque généralisée ou systématique contre une population civile[40]. L’élément moral requis pour la persécution apparaît « plus strict que pour les crimes contre l’humanité habituels, tout en demeurant en deçà de celui requis pour le génocide »[41]. Il en découle qu’une accusation de persécution doit préciser les éléments suivants : « (a) les éléments requis par le Statut pour tous les crimes contre l’humanité ; b) le déni manifeste ou flagrant d’un droit fondamental atteignant le même degré de gravité que les autres actes prohibés par l’article 5 du Statut ; et c) des raisons discriminatoires »[42] (§ 200).

 

Dans l’affaire Kordic, la Chambre de première instance II avait estimé que l’accusé était animé de l’intention requise pour le crime de persécution lorsqu’il a adhéré au but de la politique discriminatoire[43]. De manière générale, les Chambres de première instance du TPIY ont déduit l’intention discriminatoire de l’accusé de sa participation volontaire ou en connaissance de cause dans une campagne de mauvais traitements systématiques à l’encontre d’un groupe politique, religieux ou ethnique spécifique (§ 201).

 

Après avoir rappelé la jurisprudence du Tribunal, la Chambre se réfère aux accords passés entre le Procureur et les accusés dans l’affaire du camp de Keraterm, accords qui avaient abouti à la condamnation de trois anciens employés de ce camp pour persécution en tant que crime contre l’humanité[44]. Dans ces accords il était dit explicitement que deux des accusés n’avaient ni commis ni fermé les yeux sur les crimes commis à Keraterm et qu’ils avaient même tenté d’en empêcher certains et d’améliorer les conditions de détention des détenus. La Chambre de première instance III, qui a accepté ces accords, a cependant admis que les faits permettaient de tenir les accusés pour coupables de persécution en tant que crime contre l’humanité[45]. La Chambre de première instance I en déduit que des individus qui n’ont pas commis de crimes ou qui ont faiblement participé à leur commission, peuvent être jugés coupables de persécution en tant que crime contre l’humanité. Le plaidoyer de culpabilité des accusés mettait en effet en avant le fait qu’ils savaient que des crimes étaient commis dans le camp de Keraterm et qu’ils avaient néanmoins continuer à exercer leurs fonctions dans le camp et à participer au fonctionnement du camp (§ 205).

 

 

VIII. - Actes inhumains

 

 

L’article 5 (i) du Statut est une disposition « résiduelle » dans la mesure où elle s’applique aux actes qui ne sont pas expressément incriminés aux autres alinéas de cet article et qui ont le même degré de gravité que les actes énumérés[46]. L’expression « actes inhumains » a déjà été définie par le Tribunal et la Chambre de première instance I se contente ici de rappeler le contenu des jugements rendus dans les affaires Kordic[47] et Kupreskic[48] en la matière (§§ 206-208).

 

 

IX. - Cumul des condamnations

 

1. - Le droit applicable

 

La Chambre rappelle (§§ 213-214) la jurisprudence issue des arrêts de la Chambre d’appel rendus dans les affaires Celebici et Jelisic. Dans le premier arrêt, la Chambre d’appel a décidé que la condamnation d’un même crime au titre de plusieurs articles du Statut du TPIY n’est possible que si chacun des articles en question se distingue des autres par l’exigence de la preuve d’un élément qui lui est propre[49]. La Chambre d’appel a appliqué ce raisonnement à la question du cumul des condamnations au titre des articles 2 et 3 du Statut pour conclure à l’impossibilité d’un tel cumul. A l’inverse, le cumul des condamnations lorsque sont violés par le même comportement criminel les articles 3 et 5 du Statut est possible, ainsi que le démontre la Chambre d’appel dans l’affaire Jelisic en appliquant le même test[50]. Lorsque le cumul des condamnations est impossible, le juge doit appliquer celui des deux articles qui est le plus précis, c’est-à-dire celui qui contient un élément constitutif supplémentaire[51].

 

Chacun des crimes commis peut donc être condamné cumulativement en tant que crime de guerre (art. 3) et crime contre l’humanité (art. 5). Mais l’acte d’accusation fait apparaître un autre problème de cumul des condamnations, certains actes étant incriminés au titre de plusieurs alinéas d’un même article. La Chambre s’est donc attachée à déterminer si le cumul est ou non possible pour chaque crime.

 

2. - Impossibilité du cumul des condamnations pour meurtre au titre des alinéas (a) et (h) de l’article 5 du Statut du TPIY

 

Les meurtres commis dans les camps sont qualifiés dans l’acte d’accusation de persécutions (art. 5 (h)), autres actes inhumains (art. 5 (i)) atteinte à la dignité des personnes (art.3 (1) (c)) et de meurtres au sens des articles 3 (1) (a) et 5 (a).

 

La Chambre ayant déjà établi que le meurtre ne pouvait être incriminé en tant qu’atteinte à la dignité des personnes, ce chef d’incrimination n’entre pas en compte dans la question du cumul des condamnations. Il en va de même de l’incrimination pour autres actes inhumains du fait de la nature subsidiaire de l’alinéa (i) de l’article 5 : en l’espèce cette incrimination est supplantée par celle de persécution (§ 217).

 

Conformément à la solution donnée dans l’arrêt Jelisic, la Chambre estime en l’espèce qu’une condamnation pour meurtre au titre des articles 3 et 5 est possible (§ 219).

 

S’agissant de l’incrimination cumulative pour meurtres au titre des articles 5 (a) (« meurtre ») et 5 (h) (« persécution »), la Chambre de première instance confirme la position qu’elle a adoptée dans l’affaire Krstic selon laquelle le cumul n’est pas possible car seul l’article 5 (h) contient un élément dans sa définition qui le distingue de l’article 5 (a), à savoir l’exigence d’une intention discriminatoire. Si l’accusé est reconnu coupable de ces deux chefs d’incrimination, le juge devra donc le condamner pour persécution (§ 220).

 

3. - Impossibilité du cumul des condamnations pour torture, atteinte à la dignité humaine et traitement cruel au titre de l’article 3 du Statut et des condamnations pour torture et persécution au titre de l’article 5

 

Les actes de torture reprochés aux accusés sont incriminés sous les chefs de persécution (art. 5 (h)), autres actes inhumains (art. 5 (i)), atteinte à la dignité des personnes (art. 3 (1) (c) Conventions de Genève), torture (art. 5 (f) et art. 3 (1) (a)) et traitement cruel (art. 3 (1) (a) Conventions de Genève).

 

La Chambre ne s’arrête pas sur la question - qui vient d’être réglée - du cumul des condamnations lorsque sont en concurrence les articles 3 et 5 du Statut. Elle étudie par contre les conséquences de l’incrimination des mêmes actes de torture au titre de trois alinéas précités du seul article 3. Seul le crime de torture ayant un élément constitutif distinct – l’exigence d’un but prohibé –, la Chambre ne peut condamner les accusés de ces trois crimes cumulativement, l’incrimination pour torture (art. 3 (1) (a)) l’emportant sur les deux autres (§§ 225-226).

 

De même, lorsque les mêmes actes peuvent être qualifiés de torture (art. 5 (f)) et de persécution (art. 5 (h)), le cumul des condamnations n’est pas possible car seul le crime de persécution contient un élément de définition qui lui est propre (le fait d’agir pour des motifs politiques raciaux ou religieux). Dans ce cas, la préférence ira donc au crime de persécution (§ 227).

 

4. - Impossibilité du cumul des condamnations pour viol, torture et persécution au titre de l’article 5 du Statut

 

L’acte d’accusation visent les viols et autres violences sexuelles exercés sur les détenus des camp sous les chefs d’incrimination de viol et violences sexuelles (art. 5 (h)), torture (art. 5 (f) et art. 3 (1) (a)), viol (art. 5 (g)), autres actes inhumains (art. 5 (i)) et atteinte à la dignité des personnes (art. 3 (1) (c)).

 

La Chambre ayant déjà établi que le cumul des condamnations en cas de poursuites pour atteinte à la dignité des personnes et torture n’était pas possible et que la seconde incrimination trouve à s’appliquer de façon prioritaire (§ 226), il reste à examiner les conséquences de la pluralité des incriminations au titre de l’article 5 du Statut.

 

A cet égard, la Chambre a déjà affirmé que si l’incrimination de persécution est retenue, elle prévaut alors sur celle d’autres actes inhumains qui doit être abandonnée. Dans les cas où le même acte est qualifié de viol, torture et persécution au titre de l’article 5 du Statut, l’accusé ne peut être condamné que pour persécution, celle-ci se distinguant des deux autres crimes par son intention discriminatoire (§ 233).

Ainsi, si un même acte est qualifié de viol, torture et persécution, il ne pourra être condamné sur la base de l’article 3 qu’en tant que torture et viol, et sur la base de l’article qu’au titre de persécution.

 

5. - Impossibilité du cumul des condamnations pour meurtre au titre des alinéas h et i de l’article 5 du Statut du TPIY

 

Le harcèlement, l’humiliation, la torture psychologique et la détention dans des conditions inhumaines sont qualifiés dans l’acte d’accusation de persécution (art. 5 (h)), d’autres actes inhumains (art. 5 (i)) et atteinte à la dignité des personnes (art. 3 (1) (c) Conventions de Genève).

 

Il a été indiqué précédemment que les accusations portées sur la base de l’article 5 (i) (« autres actes inhumains ») doivent être abandonnées au profit de celles fondées sur l’article 5 (h) relatif à la persécution. Il découle du raisonnement suivi par la Chambre pour les autres crimes que lorsque l’accusé doit répondre d’actes qualifiés de harcèlement, humiliation, torture psychologique et détention dans des conditions inhumaines, il ne peut être condamné cumulativement que pour atteinte à la dignité des personnes en tant que crime de guerre et persécution en tant que crime contre l’humanité (§§ 237-238).

 

 

X. - Théories de la responsabilité

 

1. - La participation à une entreprise criminelle conjointe : une forme de participation implicitement incluse dans l’article 7 (1) du Statut

 

A l’avocat de Kvocka qui prétendait que le Procureur ne pouvait accuser son client d’avoir participé à une entreprise criminelle conjointe faute de l’avoir explicitement mentionné dans l’acte d’accusation, le Chambre répond que s’il incombe effectivement au Procureur d’exposer clairement les chefs d’accusation dans l’acte d’accusation afin que la défense puisse se préparer, il reste que la participation à une entreprise criminelle fait partie du champ d’application de l’article 7 (1) du Statut tel que déterminé par la Chambre d’appel dans l’affaire Tadic[52]. De plus, la Chambre d’appel a considéré, dans l’affaire Celebici, que le fait de ne pas préciser le mode exact de participation de l’accusé dans l’acte d’accusation n’entache pas nécessairement celui-ci de nullité si la nature et l’origine des charges pesant sur l’accusé sont clairement exposées[53]. La Chambre rejette donc, comme elle l’avait déjà fait dans l’affaire Krstic[54], l’argument de la défense (§§ 246-247). Elle estime par ailleurs qu’il lui appartient de déterminer quelle forme de responsabilité doit, le cas échéant, endosser l’accusé eu égard à l’acte d’accusation et aux preuves présentées[55] (§ 248).

 

Cette mise au point étant faite, la Chambre définit chacune des formes de responsabilité prévues à l’article 7(1) du Statut à la lumière de la jurisprudence des Tribunaux pénaux internationaux (TPI), ainsi que de celle du Tribunal militaire international de Nuremberg (§§ 250-282). Elle ne complète la jurisprudence internationale que sur un point : en définissant l’aide et l’assistance à une entreprise criminelle conjointe.

 

2. - L’aide et l’encouragement à une entreprise criminelle conjointe

 

D’après la Chambre d’appel[56], la preuve de l’existence d’une entreprise criminelle commune exige un élément matériel démontrant la pluralité des personnes, l’existence d’un plan, projet ou dessein commun qui constitue ou implique la commission d’un crime énoncé dans le Statut, et la participation de l’accusé au projet commun. L’élément moral requiert l’intention de participer à, ou de promouvoir, l’acte ou l’objectif criminel commun, alors que la question de la responsabilité pénale à l’extérieur du plan commun n’est soulevée que si la commission d’un crime par un membre d’un groupe était prévisible et que l’accusé a volontairement pris ce risque.

 

 

L’analyse de la jurisprudence du Tribunal de Nuremberg[57] montre que les affaires dans lesquelles apparaît la notion d’entreprise criminelle conjointe peuvent être divisées en trois catégories, chacune ayant un mens rea différent : « (1) les affaires dans lesquelles tous les participants agissent en fonction d’un plan commun et possèdent la même intention criminelle ; (2) celles où les accusés ont personnellement connaissance de l’existence d’une entreprise de mauvais traitements et ont l’intention de promouvoir cette entreprise commune de mauvais traitements ; et (3) celles où il existe un plan commun créé pour suivre une certaine conduite mais au cours desquelles un acte, qui bien que n’étant pas prévu par le plan commun en est une conséquence naturelle et prévisible, est commis »[58]. C’est à la deuxième de ces catégories, dans laquelle s’inscrivent les affaires relatives aux camps de concentration, que la Chambre de première instance juge opportun de se référer en l’espèce pour évaluer la responsabilité des accusés dans le fonctionnement, comparable à une entreprise criminelle conjointe, des camps d’Omarska, Keraterm et Trnopolje (§ 268)

 

La Chambre d’appel, dans l’arrêt Tadic, a identifié dans la jurisprudence du Tribunal de Nuremberg trois éléments nécessaires pour établir la culpabilité dans les camps de concentration : « (1) l’existence d’un système organisé pour maltraiter les détenus et commettre les crimes allégués ; (2) l’accusé connaissait la nature du système ; et (3) le fait que l’accusé ait, d’une manière ou d’une autre, activement participé à l’instauration du système, c’est-à-dire ait encouragé, aidé et assisté ou de toute façon participé à la réalisation du projet criminel commun »[59]. Ces éléments, proposés par le Procureur du Tribunal militaire, ont été largement retenus par les juges[60].

 

Quant au mens rea de la participation à une entreprise criminelle conjointe, la Chambre d’appel a relevé que dans les affaires relatives aux camps de concentration il était constitué de deux éléments : la connaissance de la nature du système et l’intention de servir le plan commun visant à maltraiter les détenus[61]. Elle a également souligné que cette intention criminelle pouvait se déduire des circonstances de l’affaire[62].

 

Comme le relève la Chambre de première instance I (§ 273), la position de la Chambre d’appel est contradictoire. En effet, d’un côté elle accepte expressément la responsabilité pour participation au crime sous la forme d’une aide ou d’un encouragement, forme de participation qui ne requiert que la connaissance du système et non une intention partagée pour être condamnée, et, d’un autre côté, elle définit parfois la participation à l’aide du concept d’intention partagée et ne précise pas si cela s’applique exclusivement ou non aux co-auteurs. De l’avis de la Chambre de première instance, il découle tant de la jurisprudence du Tribunal de Nuremberg que de la jurisprudence postérieure que l’aide et l’encouragement peuvent être pris en compte dans leur forme traditionnelle en relation avec l’entreprise criminelle conjointe. Autrement dit, la connaissance de l’existence de l’entreprise et une participation substantielle dans la réalisation du plan commun suffisent à condamner celui qui aide ou encourage l’entreprise criminelle conjointe. Si les preuves montrent que l’accusé partageait l’intention criminelle, alors il passe au rang de co-auteur de l’entreprise criminelle.

 

Le niveau de participation varie d’un accusé à l’autre. Pour la Chambre d’appel, pour que sa responsabilité soit engagée « il suffit que le participant accomplisse des actes qui d’une manière ou d’une autre ont pour but de servir le plan ou but commun »[63]. Il apparaît dans la jurisprudence du TPIY que tous les individus qui ont été condamnés pour avoir participé à une entreprise criminelle conjointe ont joué un rôle direct et significatif dans cette entreprise, soit en commettant des crimes, soit en ayant activement aidé ou encouragé ces crimes (§ 275). Dans la jurisprudence du Tribunal de Nuremberg relative aux camps de concentration était retenue la responsabilité pénale des membres du personnel des camps qui avaient connaissance des crimes qui y étaient commis, sauf si leur fonction n’était liée ni à l’administration ni à la surveillance des camps et si, en dépit de leur statut, leur contribution effective à l’entreprise a été insignifiante (§ 282).

 

Bien que la Chambre d’appel ait évoqué dans l’arrêt Tadic la possibilité qu’un individu aide et encourage une entreprise criminelle conjointe, elle n’a pas précisé les modalités de cette forme de participation (§ 283). Selon la Chambre de première instance I, le co-auteur d’une entreprise criminelle conjointe partage l’intention de réaliser le plan commun et accomplit un acte ou omet d’en accomplir un dans le but de servir l’entreprise commune. Celui qui aide ou encourage ne partage pas nécessairement l’intention des co-auteurs : il suffit qu’il ait conscience que sa contribution aide ou facilite la commission du crime par l’entreprise criminelle. Dans l’hypothèse d’un crime continu (« continuing crime »), comme c’est le cas en l’espèce, l’intention partagée d’un accusé ayant participé à l’entreprise conjointe peut être déduite du fait qu’il avait connaissance de l’existence de cette entreprise et de sa participation permanente aux activés de l’entreprise si cette participation est significative du point de vue de la position de l’accusé dans l’entreprise ou de l’effet de sa participation sur la réalisation du plan commun. Celui qui aide ou encourage l’entreprise criminelle et est donc un complice de l’entreprise peut en devenir un co-auteur, même s’il ne commet pas physiquement de crime, si sa participation est de longue durée ou s’il s’implique plus directement dans le fonctionnement de l’entreprise. La Chambre reconnaît qu’il est parfois difficile de tracer une frontière entre les co-auteurs et ceux qui aident ou encouragent l’entreprise, en particulier lorsque les accusés participaient à un niveau intermédiaire ou n’ont pas commis personnellement de crime. Elle estime toutefois que, lorsque l’accusé participe à un crime qui sert les buts de l’entreprise criminelle, il est alors souvent raisonnable de considérer que sa participation l’a élevé au rang de co-auteur (§ 284).

 

Le niveau de participation requis pour être considéré comme participant à l’entreprise criminelle conjointe est moins élevé que celui qui élève celui qui aide ou encourage l’entreprise au rang de co-auteur de cette entreprise. Aussi la Chambre doit-elle dans un premier temps déterminer si le niveau de participation de l’accusé à l’entreprise est suffisant pour engager sa responsabilité puis, dans un deuxième temps, établir si le mode de participation de l’accusé en fait un complice pour l’aide et l’encouragement qu’il a apporté ou un co-auteur de l’entreprise criminelle (§ 287).

 

Lorsque le crime commis requiert une intention spéciale, comme c’est le cas en l’espèce avec le crime de persécution qui implique une intention discriminatoire, l’accusé doit également satisfaire à cette exigence supplémentaire pour être qualifié de co-auteur de l’entreprise criminelle. Si l’accusé n’a fait qu’aider ou encourager l’entreprise, il suffit qu’il ait eu connaissance de l’intention partagée de l’auteur. Cette connaissance peut également être déduite des circonstances entourant le crime (§ 288).

 

L’aide ou l’encouragement fournit par l’accusé doit avoir un effet substantiel sur le crime commis par un des co-auteurs. Le seuil précis à partir duquel on peut considérer que l’accusé a participé à une entreprise criminelle conjointe n’a pas été fixé, la Chambre d’appel dans l’affaire Tadic ayant seulement indiqué que cette participation doit d’une manière ou d’une autre être destinée à servir le plan ou but commun[64] (§ 289).

 

Pour évaluer le niveau de participation nécessaire pour engager la responsabilité d’un individu pour participation à une entreprise criminelle, la Chambre s’appuient sur de nombreuses affaires résolues par le TPIY, les Tribunaux de Nuremberg et de Tokyo ainsi que les tribunaux alliés (§§ 291-305). Elle en déduit que lorsqu’un centre de détention fonctionne de telle sorte que l’intention discriminatoire de l’opération est évidente, toute personne qui participe en connaissance de cause de manière significative dans le fonctionnement du centre ou qui aide ou facilite son activité, peut voir sa responsabilité engagée pour participation à une entreprise criminelle, soit comme co-auteur soit pour l’aide ou l’encouragement qu’il a apporté à l’entreprise, en fonction de sa position dans la hiérarchie organisationnelle de l’entreprise et le degré de sa participation (§ 306).

 

La Chambre de première instance considère que « les personnes qui font un travail ou participent à un système dans lequel des crimes sont commis à grande échelle et de façon systématique peuvent voir leur responsabilité pénale engagée si elles participent en connaissance de cause à l’effort criminel, et si leurs actes ou omissions aident ou facilitent de manière significative la commission des crimes »[65].

La Chambre précise que cela ne signifie pas que toute personne travaillant dans un camp où les conditions de détention sont inhumaines est automatiquement coupable d’avoir participé à une entreprise criminelle conjointe. La participation à cette entreprise doit être importante (« significant ») : l’acte ou l’omission en question doit contribuer à rendre l’entreprise efficace ou effective (§ 309)

 

La Chambre de première instance estime en outre qu’en période de conflits armés, le seuil requis pour retenir la responsabilité d’un participant de niveau inférieur ou intermédiaire à une entreprise criminelle, soit en tant que co-auteur soit en tant que complice, exige en principe un niveau plus important de participation que celui de la simple obéissance à un ordre de remplir une fonction de niveau inférieur dans le cadre de l’entreprise criminelle en une seule occasion. Le niveau de participation de l’accusé et le caractère significatif ou non de sa participation sont déterminés en fonction de plusieurs facteurs, notamment la taille de l’entreprise criminelle, les fonctions remplies, la position de l’accusé, la durée de la participation après la prise de conscience du caractère criminel de l’entreprise, les efforts fournis pour empêcher l’activité criminel ou entraver le bon fonctionnement du système, la gravité et l’étendue des crimes commis ainsi que l’efficacité, le zèle ou la cruauté gratuite mis dans l’exécution des fonctions. Doivent également être prises en compte les preuves directes d’une intention partagée ou d’un accord avec le plan criminel telles que la participation importante, continue ou répétée dans le système, des déclarations verbales ou encore la commission d’un crime. D’après la Chambre, le facteur le plus important à examiner est le rôle joué par l’accusé dans la gravité et l’étendue des crimes commis (§ 311).

 

Il n’est pas exigé du participant à l’entreprise criminelle qu’il soit au courant de chacun des crimes commis. Le fait qu’il sache simplement que des crimes sont commis dans le cadre d’une organisation et qu’il participe en connaissance de cause au fonctionnement efficace ou effectif de cette organisation en lui fournissant de l’aide ou en facilitant son activité suffit à engager sa responsabilité (§ 312).

 

En l’espèce, la Chambre estime n’avoir pas assez de preuves pour déterminer si les camps de Keraterm et de Trnopolje fonctionnaient individuellement ou conjointement en tant qu’entreprise criminelle conjointe. Toutefois, en ce qui concerne le camp d’Omarska pour lequel les preuves sont accablantes, elle conclut au-delà de tout doute raisonnable qu’il s’agissait d’une entreprise criminelle conjointe (§ 319).

 

3. - Responsabilité du supérieur hiérarchique

 

La Chambre rappelle (§ 314) que la jurisprudence des Chambres de première instance du Tribunal pose trois conditions à l’application de l’article 7 (3) du Statut relatif à la responsabilité du supérieur hiérarchique : (1) l’existence d’un lien de subordination entre l’accusé et l’auteur du crime principal ; (2) le fait que le supérieur savait ou avait des raisons de savoir que son subordonné avait commis, était en train de commettre ou était sur le point de commettre un crime ; et (3) le supérieur hiérarchique n’a pas pris toutes les mesures nécessaires et raisonnables pour prévenir le crime ou en punir l’auteur[66]. Quant à la Chambre d’appel, elle a considéré que l’article 7 (3) vise tant les supérieurs militaires que les supérieurs civils à condition que ces derniers exercent un contrôle effectif sur leurs subordonnés[67]. Par « contrôle effectif », la Chambre d’appel entend le pouvoir, de jure ou de facto, d’empêcher le crime d’un subordonné ou de punir les auteurs d’un crime après sa commission[68]. Le supérieur, s’il ne punit pas nécessairement lui-même l’auteur du crime, doit cependant jouer un rôle important dans la procédure disciplinaire.

 

Le supérieur est tenu d’agir à partir du moment où il sait ou a des raisons de savoir que des crimes ont été commis ou sont sur le point d’être commis par ses subordonnés. A cet égard, la Chambre d’appel considère que l’article 7 (3) du Statut n’impose pas au supérieur le devoir d’obtenir des informations sur les crimes commis par ses subordonnés par des moyens qui ne lui sont pas habituels sauf si, d’une façon ou d’une autre, il est averti que des crimes sont en train d’être commis[69] (§ 317). Les informations auxquelles a accès le supérieur peuvent être écrites ou orales, explicites ou implicites, vagues ou précises ; l’essentiel est qu’elles fassent apparaître la nécessité de mener des enquêtes complémentaires pour vérifier si les subordonnés commettaient ou s’apprêtaient à commettre des infractions[70] (§ 318).

 

 

* * *

 


NOTES

 

[1] V. Le Procureur c. Dusko Tadic, IT-94-1, Chambre d’appel, Arrêt relatif à l’appel de la Défense concernant l’exception préjudicielle d’incompétence, 2 octobre 1995, § 94.

[2] Le Procureur c. Dusko Tadic, IT-94-1, Chambre de première instance II, Jugement, 7 mai 1997, § 609 ; Le Procureur c. Zejnil Delalic et al., IT-96-21, Chambre d’appel, Arrêt, 20 février 2001, § 143 ; Le Procureur c. Dragoljub Kunarac, Radomir Kovac et Zoran Vukovic, IT-96-23 et IT-96-23/1, Chambre de première instance II, Jugement, 22 février 2001, § 406.

[3] La même exigence se retrouve dans Le Procureur c. Dragoljub Kunarac, Radomir Kovac et Zoran Vukovic, IT-96-23 et IT-96-23/1, Chambre de première instance II, Jugement, 22 février 2001, § 407 ; Le Procureur c. Dusko Tadic, IT-94-1, Chambre de première instance II, Jugement, 7 mai 1997, §§ 614-616 ; Le Procureur c. Zejnil Delalic et al., IT-96-21, Chambre d’appel, Arrêt, 20 février 2001, § 420.

[4] Le Procureur c. Dragoljub Kunarac, Radomir Kovac et Zoran Vukovic, IT-96-23 et IT-96-23/1, Chambre de première instance II, Jugement, 22 février 2001, § 410. La Chambre de première instance II s’était elle-même inspirée de l’arrêt rendu par la Chambre d’appel dans l’affaire Tadic : Le Procureur c. Dusko Tadic, IT-94-1, Chambre d’appel, Arrêt, 15 juillet 1999, §§ 248-251.

[5] La Chambre renvoie aux décisions suivantes : Le Procureur c. Jean-Paul Akayesu, Chambre de première instance I, Jugement, 2 septembre 1998, § 589 ; Le Procureur c. Zejnil Delalic et al., IT-96-21, Chambre de première instance II, Jugement, 16 novembre 1998, § 439 ; Le Procureur c. Tihomir Blaskic, IT-95-14, Chambre de première instance I, Jugement, §§ 153, 181 et 217 ; Le Procureur c. Radislav Krstic, IT-98-33, Chambre de première instance I, Jugement, 2 août 2001, § 485.

[6] V. Le Procureur c. Anto Furundzija, IT-95-17/1, Chambre de première instance II, Jugement, 10 décembre 1998, § 162, et Le Procureur c. Jean-Paul Akayesu, Chambre de première instance I, Jugement, 2 septembre 1998, § 594.

[7] Le Procureur c. Dragoljub Kunarac, Radomir Kovac et Zoran Vukovic, IT-96-23 et IT-96-23/1, Chambre de première instance II, Jugement, 22 février 2001, § 496. On notera que l’article 7 (2) (e) du Statut de la Cour pénale internationale va dans le même sens.

[8] Le Procureur c. Zejnil Delalic et al., IT-96-21, Chambre de première instance II, Jugement, 16 novembre 1998, § 470.

[9] Le Procureur c. Anto Furundzija IT-95-17/1, Chambre de première instance II, Jugement, 10 décembre 1998, § 162.

[10] Traduction de l’auteur :

« (i) Torture consists of the infliction, by act or omission, of severe pain or suffering, whether physical or mental;

(ii) the act or omission must be intentional; and

(iii) the act or omission must be for a prohibited purpose, such as obtaining information or a confession, punishing, intimidating, humiliating, or coercing the victim or a third person, or discriminating, on any ground, against the victim or a third person ».

[11] Le Procureur c. Zejnil Delalic et al., IT-96-21, Chambre de première instance II, Jugement, 16 novembre 1998, § 468. Comp. CEDH, Irlande c. Royaume-Uni, 18 janvier 1978, Série A, n° 25, § 167.

[12] Référence est faite, à titre d’exemple, à l’arrêt de la CEDH Aydin c. Turquie ,26 août 1997, Recueil 1997-VI, § 82.

[13] Le Procureur c. Zejnil Delalic et al., IT-96-21, Chambre de première instance II, Jugement, 16 novembre 1998, §§ 495-496 et 941-943 ; Le Procureur c. Anto Furundzija, IT-95-17/1, Chambre de première instance II, Jugement, 10 décembre 1998, §§ 163 et 171 ; Le Procureur c. Jean-Paul Akayesu, Chambre de première instance I, Jugement, §§ 597-598.

[14] V. Le Procureur c. Zejnil Delalic et al., IT-96-21, Chambre de première instance II, Jugement, 16 novembre 1998, § 552 ; Le Procureur c. Goran Jelisic, IT-95-10, Chambre de première instance I, Jugement, 14 décembre 1999, § 41; Le Procureur c. Tihomir  Blaskic, IT-95-14, Chambre de première instance I, Jugement, 3 mars 2000, § 186; Le Procureur c. Zejnil Delalic et al., IT-96-21, Chambre d’appel, Arrêt, § 424 ; Le Procureur c. Dario Kordic et Mario Cerkez, IT-95-14/2, Chambre de première instance III, Jugement, 26 février 2001, § 265.

[15] Le Procureur c. Zejnil Delalic et al., IT-96-21, Chambre de première instance II, Jugement, 16 novembre 1998, § 510.

[16] Le Procureur c. Zejnil Delalic et al., IT-96-21, Chambre de première instance II, Jugement, 16 novembre 1998, § 552.

[17] Le Procureur c. Zlato Aleksovski, IT-95-14/1, Chambre de première instance I, Jugement, 25 juin 1999, § 54 ; Le Procureur c. Dragoljub Kunarac, Radomir Kovac et Zoran Vukovic, IT-96-23 et IT-96-23/1, Chambre de première instance II, Jugement, 22 février 2001, § 502.

[18] Le Procureur c. Dragoljub Kunarac, Radomir Kovac et Zoran Vukovic, IT-96-23 et IT-96-23/1, Chambre de première instance II, Jugement, 22 février 2001, § 514.

[19] Le Procureur c. Dragoljub Kunarac, Radomir Kovac et Zoran Vukovic, IT-96-23 et IT-96-23/1, Chambre de première instance II, Jugement, 22 février 2001, § 507.

[20] Le Procureur c. Dragoljub Kunarac, Radomir Kovac et Zoran Vukovic, IT-96-23 et IT-96-23/1, Chambre de première instance II, Jugement, 22 février 2001, §§ 509-512.

[21] Le Procureur c. Zlato Aleksovski, IT-95-14/1, Chambre de première instance I, Jugement, 25 juin 1999, § 229.

[22] Le Procureur c. Zlato Aleksovski, IT-95-14/1, Chambre de première instance I, Jugement, 25 juin 1999, §§ 184-210.

[23] Le Procureur c. Anto Furundzija IT-95-17/1, Chambre de première instance II, Jugement, 10 décembre 1998, § 272 ; Le Procureur c. Dragoljub Kunarac, Radomir Kovac et Zoran Vukovic, IT-96-23 et IT-96-23/1, Chambre de première instance II, Jugement, 22 février 2001, §§ 766-774.

[24] Le Procureur c. Jean-Paul Akayesu, Chambre de première instance I, Jugement, 2 septembre 1998, § 688.

[25] Le Procureur c. Anto Furundzija IT-95-17/1, Chambre de première instance II, Jugement, 10 décembre 1998, § 185.

[26] Le Procureur c. Dragoljub Kunarac, Radomir Kovac et Zoran Vukovic, IT-96-23 et IT-96-23/1, Chambre de première instance II, Jugement, 22 février 2001, § 460.

[27] Le Procureur c. Zejnil Delalic et al., IT-96-21, Chambre de première instance II, Jugement, 16 novembre 1998, § 495

[28] Le Procureur c. Anto Furundzija IT-95-17/1, Chambre de première instance II, Jugement, 10 décembre 1998, § 271.

[29] Le Procureur c. Jean-Paul Akayesu,  Chambre de première instance I, 2 septembre 1998, Jugement, § 688.

[30] Le Procureur c. Dusko Tadic, IT-94-1, Chambre de première instance II, Jugement, 7 mai 1997, § 715.

[31] Le Procureur c. Kupreskic, IT-95-16, Chambre de première instance II, Jugement, 14 janvier 2000, § 621.

[32] Le Procureur c. Zoran Kupreskic et al., IT-95-16, Chambre de première instance II, Jugement, 14 janvier 2000, § 605.

[33] Le Procureur c. Dario Kordic et Mario Cerkez, IT-95-14/2, Chambre de première instance III, Jugement, 26 février 2001, § 193.

[34] Le Procureur c. Zoran Kupreskic et al., IT-95-16, Chambre de première instance II, Jugement, 14 janvier 2000, § 619 ; Le Procureur c. Dario Kordic et Mario Cerkez, IT-95-14/2, Chambre de première instance III, Jugement, 26 février 2001, § 195.

[35] Le Procureur c. Zoran Kupreskic et al., IT-95-16, Chambre de première instance II, Jugement, 14 janvier 2000, § 622.

[36] Le Procureur c. Dario Kordic et Mario Cerkez, IT-95-14/2, Chambre de première instance III, Jugement, 26 février 2001, § 192.

[37] § 186. Traduction de l’auteur : « The Trial Chamber reads this statement as meaning that jointly or severally, the acts alleged in the Amended Indictment must amount to persecution, not that each discriminatory act alleged must individually be regarded as a violation of international law ».

[38] Ndlr : le verbe "subsumer" signifie « penser [quelque chose] comme compris dans un ensemble » (cf. Le Petit Larousse compact, Paris, Larousse - Bordas, 1999, p. 971).

[39] Le Procureur c. Jean-Paul Akayesu, Chambre de première instance I, 2 septembre 1998, Jugement, § 732.

[40] Le Procureur c. Dario Kordic et Mario Cerkez, IT-95-14/2, Chambre de première instance III, Jugement, 26 février 2001, §§ 211-212.

[41] Le Procureur c. Zoran Kupreskic et al., IT-95-16, Chambre de première instance II, Jugement, 14 janvier 2000, § 636.

[42] Le Procureur c. Zoran Kupreskic et al., IT-95-16, Chambre de première instance II, Jugement, 14 janvier 2000, § 627.

[43] Le Procureur c. Dario Kordic et Mario Cerkez, IT-95-14/2, Chambre de première instance III, Jugement, 26 février 2001, § 220.

[44] Joint Submission of the Prosecution and the Accused Dragan Kolundzija of a Plea Agreement, 30 August 2001; Admitted Facts Relevant to the Plea Agreement for Dragan Kolundzija, 4 September 2001; Joint Submission of the Prosecution and the Accused Dusko Sikirica and Admitted Facts, 6 September 2001; Joint Submission of the Prosecution and the Accused Damir Dosen and Admitted Facts, 6 September 2001. Sikirica was Commander of Security, and Dosen and Kolundzija were guard shift leaders in the Keraterm camp.

[45] Oral Decision regarding plea agreement for the accused Dragan Kolundzija, 4 September 2001; Oral Decision regarding plea agreement for the accused Duško Sikirica and Damir Došen, 19 September 2001.

[46] Affirmation que l’on trouve déjà dans Le Procureur c. Dusko Tadic, IT-94-1, Chambre de première instance II, Jugement, 7 mai 1997, § 729 ; Le Procureur c. Kupreskic, IT-95-16, Chambre de première instance II, jugement, 14 janvier 2000, § 566. 

[47] Le Procureur c. Kordic et Cerkez, IT-95-14/2, Chambre de première instance III, Jugement, 26 février 2001, §§ 271-272.

[48] Le Procureur c. Zoran Kupreskic et al., IT-95-16, Chambre de première instance II, Jugement, 14 janvier 2000, § 566. 

[49] Le Procureur c. Zejnil Delalic et al., IT-96-21, Chambre d’appel, Arrêt, 20 février 2001, §§ 412-413.

[50] Le Procureur c. Goran Jelisic, IT-95-10, Chambre d’appel, Arrêt, 5 juillet 2001, § 82.

[51] Le Procureur c. Zejnil Delalic et al., IT-96-21, Chambre d’appel, Arrêt, 20 février 2001, § 413.

[52] Le Procureur c. Dusko Tadic, IT-94-1, Chambre d’appel, Arrêt, 15 juillet 1999, § 190.

[53] Le Procureur c. Zejnil Delalic et al., IT-96-21, Chambre d’appel, Arrêt, 20 février 2001, § 351.

[54] Le Procureur c. Radislav Krstic, IT-98-33, Chambre de première instance I, Jugement, 2 août 2001, § 602.

[55] Elle rejoint ainsi la position de la Chambre d’appel : Le Procureur c. Zejnil Delalic et al., IT-96-21, Chambre d’appel, Arrêt, 20 février 2001, § 351.

[56] Le Procureur c. Dusko Tadic, IT-94-1, Chambre d’appel, Arrêt, 15 juillet 1999, § 227.

[57] Le Procureur c. Dusko Tadic, IT-94-1, Chambre d’appel, Arrêt, 15 juillet 1999, §§ 196-204.

[58] § 267. Traduction de l’auteur : « 1) those where all participants act pursuant to a common design and possess the same criminal intent; 2) those where the accused have personal knowledge of a system of ill-treatment and an intent to further the common system of ill-treatment; and 3) those where there is a common design to pursue a course of conduct but an act is committed outside the common design which is nonetheless a natural and foreseeable consequence of the common purpose ».

[59] Traduction de l’auteur : « (i) the existence of an organised system to ill-treat the detainees and commit the various crimes alleged; (ii) the accused’s awareness of the nature of the system; and (iii ) the fact that the accused in some way actively participated in enforcing the system, i.e. encouraged, aided and abetted or in any case participated in the realisation of the common criminal design ». Le Procureur c. Dusko Tadic, IT-94-1, Chambre d’appel, Arrêt, 15 juillet 1999, § 202.

[60] Le Procureur c. Dusko Tadic, IT-94-1, Chambre d’appel, Arrêt, 15 juillet 1999, § 202.

[61] Le Procureur c. Dusko Tadic, IT-94-1, Chambre d’appel, Arrêt, 15 juillet 1999, § 203.

[62] Le Procureur c. Dusko Tadic, IT-94-1, Chambre d’appel, Arrêt, 15 juillet 1999, § 220.

[63] Le Procureur c. Dusko Tadic, IT-94-1, Chambre d’appel, Arrêt, 15 juillet 1999, § 229 (iii).

[64] Le Procureur c. Dusko Tadic, IT-94-1, Chambre d’appel, Arrêt, 15 juillet 1999, § 229 (iii)

[65] § 608. Traduction de l’auteur : « persons who work in a job or participate in a system in which crimes are committed on such a large scale and systematic basis incur individual criminal responsibility if they knowingly participate in the criminal endeavor, and their acts or omissions significantly assist or facilitate the commission of the crimes ».

[66] V. Le Procureur c. Zejnil Delalic et al., IT-96-21, Chambre de première instance II, Jugement, 16 novembre 1998, § 346 ; Le Procureur c. Zlato Aleksovski, IT-95-14/1, Chambre de première instance I, jugement, 25 juin 1999, § 69 ; Le Procureur c. Kordic et Cerkez, IT-95-14/2, Chambre de première instance III, 26 février 2001, § 401; Le Procureur c. Blaskic, IT-95-14, Chambre de première instance I, Jugement, § 395.

[67] Le Procureur c. Zejnil Delalic et al., IT-96-21, Chambre d’appel, Arrêt, 20 février 2001, § 196.

[68] Le Procureur c. Zejnil Delalic et al., IT-96-21, Chambre d’appel, Arrêt, 20 février 2001, § 192.

[69] Le Procureur c. Zejnil Delalic et al., IT-96-21, Chambre d’appel, Arrêt, 20 février 2001, § 226.

[70] Le Procureur c. Zejnil Delalic et al., IT-96-21, Chambre d’appel, Arrêt, 20 février 2001, § 238 ; Le Procureur c. Zejnil Delalic et al., IT-96-21, Chambre de première instance II, Jugement, 16 novembre 1998, § 393.

 


 

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